Apprendre aux enfants à se défendre
Comme chaque année, je suis allé à la rencontre des parents à l’école de mon fils, avant-hier.
Le directeur de l’école s’est présenté aux parents, a expliqué les différents règlements de l’école, etc.
Puis il a dit que, cette année, l’école (en collaboration avec le ministère de l’éducation) a mis en place un programme spécial visant à lutter contre l’intimidation.
«Mais il ne faut pas oublier que l’enfance est le moment où les enfants “font leurs armes”, a-t-il ajouté. C’est parfaitement normal qu’il y ait des heurts dans une cour d’école.
«À l’école, les enfants font l’apprentissage des affrontements avec d’autres. Ils apprennent à gérer les conflits.
«Tout n’est pas de l’intimidation. Un enfant qui se moque d’un autre, ça a toujours existé. Mais quand ils se mettent à cinq pour se moquer d’un des leurs, là, oui, il faut intervenir…»
Les enfants vont toujours s’écoeurer, se tirer la pipe, se crier des noms.
SE FAIRE UNE CARAPACE
Quels propos rafraîchissants! Quelle remarque pleine de gros bon sens!
Ça change des discours alarmistes de certains profs et certains directeurs qui voient de l’intimidation partout…
Oui, il faut lutter contre l’intimidation. Comme il faut lutter contre le sexisme, l’homophobie, le racisme, etc. Mais il ne faut pas non plus capoter. « Boys will be boys », comme le dit l’expression anglaise. Les enfants vont toujours s’écoeurer, se tirer la pipe, se crier des noms, voire se bousculer. C’est la vie. En tant que parents, nous devons apprendre à nos enfants à se faire respecter, à prendre leur place – bref, à gérer des conflits sans qu’un adulte intervienne constamment pour les défendre.
Personnellement, j’ai grandi dans un quartier rock’n’roll (Verdun près de Pointe-saint-charles). Des bullies, il y en avait à tous les coins de rue.
Je me faisais régulièrement crier des noms, menacer, écoeurer.
Quand ça arrivait, je ne me réfugiais pas sous les jupes de ma mère. Je faisais face à la situation seul.
N’étant pas bagarreur (ni particulièrement courageux), j’utilisais l’humour pour désamorcer le conflit.
Au fil des ans, j’ai développé des moyens de défense pour faire face à ce genre de situation. Je me suis forgé une carapace.
Qui m’a été très utile lorsque des centaines d’imbéciles portant fièrement le carré rouge m’ont harcelé et intimidé, moi et ma famille, en 2012.
Sous le regard «bienveillant» de Martine, Gabriel et Léo.
LA JUNGLE
La vie n’est pas un long fleuve tranquille.
C’est une rivière impétueuse, avec des rapides, des chutes, des torrents violents.
On ne rend pas service à nos enfants lorsqu’on les élève dans la ouate ou dans du papier bulle.
De même, le monde du travail, en 2015, n’est pas une colonie de vacances peuplée de gentils moniteurs portant une salopette orange. C’est une jungle.
Si tu fais une gaffe, tu coules. Personne ne te donnera une deuxième chance.
Tu ne fais pas l’affaire? Il y en a 35, derrière toi, qui ne demandent qu’à te remplacer. Et qui chargent probablement moins cher.
Bien sûr qu’il faut lutter contre l’intimidation.
Mais il faut aussi pouvoir faire la distinction entre la vraie intimidation et des jeux cruels d’enfants.
Pas facile de faire la distinction? Non.
Mais qui a dit qu’élever des enfants était facile?