Le Journal de Quebec

Le téflon de Thomas Mulcair

- JOSÉE LEGAULT josee.legault@quebecorme­dia.com @joseelegau­lt

À un mois de l’élection, les attaques contre le chef du NPD fusent de toutes parts. Au Canada anglais, néo-démocrates, libéraux et conservate­urs ferraillen­t dans une lutte à trois serrée. Dans un combat parallèle à deux, Justin Trudeau et Thomas Mulcair se disputent le vote «antiHarper».

Au Québec où la vague orange de 2011 prend des airs de tsunami, le chef néodémocra­te est la cible constante de Gilles Duceppe. Même d’anciens ministres de Jean Charest sautent dans l’arène. Ils accusent Tom Mulcair d’avoir voulu «privatiser» le parc du Mont- Orford en 2005 lorsqu’il était ministre de l’environnem­ent.

L’opération dégage un fort parfum de vendetta. La rancune du clan Charest contre M. Mulcair n’est pas nouvelle. Elle perdure depuis sa démission en 2006 après plusieurs différends, dont son opposition à la vente du même parc à des intérêts privés proches du Parti libéral du Québec.

La pensée qu’il puisse un jour devenir premier ministre du Canada – le poste dont a longtemps rêvé M. Charest luimême – n’a rien pour les réjouir.

L’« AFFAIRE DU NIQAB »

À moins de 20 % dans les sondages, le Bloc québécois se bat avec l’énergie du désespoir. Les attaques répétées de M. Duceppe contre la position ambiguë du NPD sur le dossier pétrolier et le rappel de vieilles déclaratio­ns controvers­ées du chef néo-démocrate ont néanmoins échoué. Le téflon de Tom Mulcair est resté intact.

Les bloquistes misent donc sur l’«affaire du niqab» et la confusion qui l’entoure.

La Cour d’appel fédérale n’a fait que rejeter une requête du gouverneme­nt Harper sur sa propre directive interdisan­t le port du niqab aux cérémonies de citoyennet­é, mais la perception populaire est qu’un tribunal vient d’«approuver» le port du niqab.

Le refus de Justin Trudeau et de Tom Mulcair de condamner ce puissant symbole politique d’asservisse­ment des femmes est un autre cadeau pour le Bloc et le Parti conservate­ur.

Les appuis aux libéraux chez les francophon­es étant minimes, la publicité bloquiste où l’on voit une goutte de pétrole s’échapper d’un pipeline pour prendre la forme d’un niqab ne vise d’ailleurs que le NPD.

LE RISQUE

On ne s’en prend pas non plus à Stephen Harper qui, pour ses propres fins électorali­stes, s’est limité à une «directive» au lieu d’adopter une loi obligeant de prêter serment à visage découvert. Un autre cas de wedge politics – cette politique de la polarisati­on tant prisée par M. Harper.

Nul doute que Gilles Duceppe prépare aussi ses munitions en vue du premier débat des chefs en français diffusé ce jeudi. Les prochains sondages diront si l’«affaire du niqab» réussit ou non à égratigner le téflon néo-démocrate.

Or, cette bataille obligée de Tom Mulcair sur plusieurs fronts – du jamais vu pour un chef dont le parti n’est pas au pouvoir –, crée une dynamique politique sans précédent qui n’est pas sans risque pour la majorité d’électeurs en quête d’un nouveau gouverneme­nt.

À force de cibler autant le chef du NPD, Gilles Duceppe et Justin Trudeau risquent de perdre de vue un Stephen Harper trop heureux de les voir pointer leurs canons loin de lui.

La rancune du clan Charest contre M. Mulcair n’est pas nouvelle. Elle perdure depuis sa démission en 2006 après plusieurs différends

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