Le Journal de Quebec

Joueurs de baseball et ambassadeu­rs

D’importants enjeux politiques derrière la présence des trois nouveaux Cubains des Capitales

- Jean-nicolas Blanchet l Jnblanchet­jdq

Des enjeux majeurs sur le plan des relations internatio­nales reposaient sur les épaules des Cubains des Capitales de Québec, et ce, bien audelà de leurs prouesses sur le terrain. Ceux-ci sont repartis dans les Caraïbes la semaine dernière.

Ils sont des exceptions. Ce sont les premiers joueurs de baseball de Cuba à avoir évolué dans une ligue profession­nelle de baseball en Amérique du Nord… sans s’être enfuis de leur patrie.

Leur présence reposait sur une collaborat­ion hors de l’ordinaire entre Cuba, le Canada et les États-unis. L’an dernier, l’équipe a aligné Yunieksy Gourriel et cette année se sont ajoutés Yordan Manduley, Ismael Jimenez et Alexeï Bell, trois vedettes dans leur pays, où ils sont reconnus partout. Ici, ils admettent que c’est un peu plus tranquille.

Avec l’ouverture des relations diplomatiq­ues américano-cubaines, il y a enfin des possibilit­és, à court terme, de voir des Cubains se joindre au baseball majeur aux États-unis en toute légalité.

La centaine de joueurs qui l’a fait jusqu’ici s’est enfuie illégaleme­nt en abandonnan­t sa famille et en risquant parfois sa vie en bateau dans la mer des Caraïbes (voir autre texte).

PORTER L’AVENIR

Le cas des Cubains des Capitales était donc une sorte de projet pilote réussi qui pourrait précéder une vague importante de départs des joueurs cubains vers le baseball nordaméric­ain en toute légalité.

«Je sens qu’ils ont une pression sur les épaules. Ils savaient que s’ils brisaient l’entente, ils allaient faire mal à tous les athlètes cubains. Mais, en la respectant, ils envoient un bon signal à leur gouverneme­nt. Ils portaient un peu l’avenir des athlètes cubains en Amérique du Nord», explique le président des Capitales, Michel Laplante.

Au premier séjour des Capitales sur la route cet été, le gérant de l’équipe, Patrick Scalabrini, a admis qu’il avait certaines craintes. «J’étais un peu nerveux. Je me disais: “Bon, est-ce que le joueur va être là demain matin?»

HOCKEY ET ASHTON

Oui, il était là, et cette crainte s’est estompée rapidement. Peu de temps après leur arrivée, les Cubains chantaient «Je t’aime à la folie» de Serge Lama, ils chaussaien­t des patins à glace et ils commandaie­nt chez Ashton. Ils ont plongé tête première dans le choc culturel.

«Ma famille vaut plus que tout l’argent du monde», a dit l’un des Cubains, Alexeï Bell, au gérant Patrick Scalabrini, concernant les chances qu’il accepte une offre d’une équipe pour se réfugier aux États-unis, ce qui l’aurait empêché de revenir à Cuba.

En 2008, Bell était le meilleur frappeur de l’équipe de Santiago à Cuba avec un certain Adeiny Hechavarri­a. L’année suivante, Hechavarri­a s’est enfui. Aujourd’hui, il empoche près de 160 000 $ par mois chez les Marlins de Miami, soit près de 100 fois le salaire de Bell chez les Capitales.

Et c’est comment, d’être parmi les seuls Cubains à jouer en Amérique du Nord sans s’être enfuis? «C’est un rêve devenu réalité», explique Bell.

Que pensent-ils de leurs anciens compatriot­es cubains qui ont déserté le pays? «Je suis content pour eux et de leurs succès. Chacun vit à sa façon, peu importe la façon», explique Bell, moins bavard sur ce délicat sujet politique.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada