Habiles conservateurs
Vivement un débat des chefs! Un vrai débat que le vrai monde va regarder et non pas ces échanges spécialisés pour maniaques de la politique, en anglais en plus, qui ne sauraient changer le cours d’une campagne. Comme disait Yvon Deschamps : « On veut pas le savoir, on veut le voir! »
De vrais combats des chefs, les francophones en auront deux, celui de Radio-canada demain et de TVA le 2 octobre. De façon révélatrice, les anglophones, eux, n’en auront qu’un seul le 8 octobre, tard dans la campagne.
LE NIQAB
Habiles conservateurs qui savaient que celui qui avait le plus à craindre de vrais débats, c’était le premier ministre sortant. Le deuxième qui pouvait y perdre, c’est Justin Trudeau, jamais testé dans ce type d’affrontement sans merci.
Jusqu’à présent, le chef libéral a pu surfer sur son look d’acteur de cinéma, le souvenir de son père, de même qu’un PLC longtemps parti naturel de gouvernement au pays, comme le rappelle la présence des anciens premiers ministres Chrétien et Martin.
Celui qui avait besoin de vrais débats en anglais, c’est Thomas Mulcair. Pour l’heure, il en aura deux en français, où on lui parlera du… niqab. Car les conservateurs ont coincé de façon machiavélique les néo-démocrates sur le port du niqab lors de la cérémonie d’assermentation d’une nouvelle Canadienne.
Quelle ironie! En refusant de se dissocier des aspects les plus délirants du multiculturalisme, le prétendant Mulcair en est réduit à incarner le statu quo face à un Harper au pouvoir depuis dix ans, alors que la position conservatrice/bloquiste rejoint le bon sens québécois et canadien.
Nul doute que M.M. Harper et Duceppe tireront à boulets rouges sur le nouveau chouchou des francophones, auxquels le niqab fait unanimement horreur. Au pire, M. Harper verra sa mauvaise performance en français « rapportée » dans les médias anglophones; au mieux, il fera des gains dans la région de Québec.
NÉO-DÉMOCRATES EN PANNE
Quatre semaines avant l’élection, les conservateurs restent clairement dans la course malgré l’affaire Duffy, la récession économique, leur froideur à l’égard des réfugiés. Quant aux libéraux, ils s’en tirent mieux que prévu avec leur pari audacieux de ne plus faire du déficit zéro une obsession. Plus l’image télévisuelle forte de Justin Trudeau, incarnant un Canada dont la majorité des Canadiens s’ennuient.
En comparaison, les néo-démocrates apparaissent en panne, leur momentum évanoui, entre deux adversaires plus clairement définis qu’eux.
Reste la question de la personnalité des trois chefs qui ont chacun une chance d’être premier ministre le 19 octobre. Cela peut être l’occasion pour le leader néodémocrate de se démarquer des deux autres.
Thomas Mulcair aura-t-il l’occasion de montrer pourquoi c’est lui, et non le faiblard Justin, qui a mené ces dernières années le combat aux Communes contre un Stephen Harper ayant fait le vide autour de lui et n’ayant plus rien à apporter aux Canadiens? Le chef démocrate pourrat-il montrer que c’est lui qui a le plus d’expérience et de potentiel comme prochain premier ministre?
Mulcair voit son occasion de faire bonne impression en anglais retardée jusqu’au seul débat dans cette langue le 8 octobre. Il traîne le boulet du niqab. Habiles conservateurs!
Habiles conservateurs qui savaient que celui qui avait le plus à craindre de vrais débats, c’était le premier ministre sortant