Regard sans pitié sur la « bête » qui gronde
Après avoir consacré quatre années à la série Malphas, le romancier Patrick Senécal revient au polar avec Faims, un roman qui examine la bête humaine et pose un regard sans pitié sur ses travers et ses envies. Cette fois, c’est un cirque aux spectacles bi
Patrick Senécal souhaite la bienvenue à ses lecteurs dans la petite ville tranquille de Kadpidi. Y vit une famille tranquille: le père, Joël, est policier; la mère, Martine, est propriétaire d’une clinique vétérinaire. Leurs enfants, Nicholas et Émilie, sont ados. Les ennuis commencent lorsque les caravanes du «Humanus Circus» débarquent en ville.
«HORREUR DANS L’INTIMITÉ»
«Je fais un retour aux sources... avec des choses différentes. Je ne suis pas habitué à parler d’une petite famille, avec les problèmes de famille, les problèmes de couple. C’est une la partie nouvelle: une espèce d’horreur, dans l’intimité», commente Patrick Senécal en entrevue. Il parle de thèmes déjà abordés dans
Le vide, Hell.com..., mais cette fois dans la vie des gens ordinaires: l’ennui, les petites horreurs, la petite noirceur quotidienne. «On peut tous s’identifier à ça: personne n’est à l’abri de ces formes de dérapages. On peut plus être en relation avec ces personnages... même si on ne veut pas l’être trop!» ajoute-t-il en riant.
Au début, Patrick Senécal voulait parler de marginaux qui viennent foutre le bordel quelque part. Mais il voulait cette fois que ses marginaux soient plus inquiétants et malsains que dans la série
Malphas. «J’ai pensé au cirque... mais je me méfiais des clichés.» Provoquer un contraste entre leur mode de vie et celui des habitants lui est apparu plus intéressant. «Rapidement, des thèmes que je traite depuis longtemps sont apparus: qu’est-ce qu’on fait avec le quotidien, avec l’envie, la bête i ntérieure qui gronde en nous et demande à sortir...»
Cette fois, au lieu que la bête gronde par désir de vengeance, comme dans Les
sept jours du talion, ou à cause de gens qui s’ennuient et ne savent plus quoi faire comme dans Le vide ou Hell.com, elle gronde... chez les gens qui ne font rien de spécial. «C’est devenu un roman qui est beaucoup plus sur le quotidien qui peut nous tuer qu’un roman sur un cirque pété. Le cirque se présentait comme une solution face à cette bête. Mais est-ce la meilleure solution? Pas nécessairement parce que c’est assez chaotique comme façon de vivre!»
COUPLE BANAL
Le titre, Faims, fait référence à cela. «On éprouve tous des faims dans notre vie, mais comment on les rassasie, ça commence à être compliqué.» Joël et Martine forment un couple banal... qui n’est pas à l’abri. «C’est un gars normal, qui est juste tanné de baiser avec la même femme, qui trouve sa vie un peu plate et veut juste y mettre un peu de piquant. Il n’y a rien de spectaculaire, mais ça prouve à quel point sa vie est rendue plate!»
Patrick, comme gars de 50 ans, se dit que lui aussi pourrait tomber dans l’ennui, que sa blonde aussi, que sa vie de famille pourrait devenir ennuyante. «Personne n’est à l’abri de ce genre de trucs. Je pense que c’est un roman que je n’aurais pas pu écrire, il y a 10, 15, 20 ans, parce que je ne voyais pas ce quotidien autant que maintenant. Il ne faut pas que le quotidien gagne sur la vie. Et celui qui est le plus chanceux dans ce roman, c’est Dominique, l’assistant de Joël, qui est heureux dans sa vie sans étincelles. Pourquoi pas?»