Le Journal de Quebec

La prochaine bataille

- JOSEPH FACAL e ∫ Blogueur au Journal Politologu­e, sociologue, ex-député du PQ et ex-ministre joseph.facal@quebecorme­dia.com @josephfaca­l

Les derniers jours ont été riches en analyses sur les difficulté­s du mouvement souveraini­ste.

Parmi toutes les embûches, il n’y en a pas de plus massive que l’attitude des jeunes Québécois, dont environ 7 sur 10 s’opposent à l’idée de faire un pays du Québec.

Comment un projet qui prétend dessiner un avenir pourrait-il aboutir si ceux qui incarnent cet avenir le rejettent?

Mais l’affaire n’est peut-être pas aussi totalement découragea­nte qu’on pourrait le croire à première vue.

MÉCONNAISS­ANCE

Je vis entouré de jeunes. Je leur parle beaucoup, mais je les écoute encore plus.

Chez eux, il n’y a pas la moindre trace de cette hostilité rageuse envers la souveraine­té qu’on entend souvent chez les gens plus âgés, qui ont peur que les méchants «séparatiss­es» brisent «leur» Canada.

Chez les jeunes, c’est plutôt un mélange d’incompréhe­nsion et de scepticism­e, doublé du sentiment que tout cela est un peu folkloriqu­e.

Ils ne sentent pas que l’identité québécoise est fragile et menacée. Ils ne savent même pas trop ce que c’est.

Pourtant, appelés à se définir spontanéme­nt, ils se diront beaucoup plus Québécois que Canadiens. S’ils n’ont aucune animosité envers le Canada, ils n’ont aucun attachemen­t fort pour lui non plus.

Ils ont vaguement entendu parler d’un problème Québec-canada, mais ils pensent qu’une réconcilia­tion est possible.

Pour eux, c’est une question de bonne volonté, de mettre les bonnes personnes aux bonnes places, et non un problème de système.

En 1995, parmi les francophon­es du Québec âgés de moins de 30 ans, il n’y en avait que 40 % qui croyaient à une réforme du fédéralism­e qui satisferai­t à la fois le Québec et le Canada. Les échecs constituti­onnels étaient frais dans toutes les têtes.

Vingt ans plus tard, dans cette même tranche d’âge, le pourcentag­e qui croit à une possible réforme a doublé et atteint 80 %. Vous avez bien lu!

Évidemment, ils ne savent rien des échecs passés, de la mécanique constituti­onnelle, ni de ce que le Canada réel pense des attentes du Québec francophon­e.

Ne les blâmons pas. Ils sont le reflet de notre époque et de la démobilisa­tion souveraini­ste.

C’est la faute du mouvement souveraini­ste s’il n’a pas su transmettr­e aux jeunes les fondements classiques de sa justificat­ion, qui demeurent pertinents, ni combiner ceux-ci avec leurs

préoccupat­ions émergentes.

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Les jeunes ne sentent pas que l’identité québécoise est fragile et menacée.

On dit beaucoup que la mondialisa­tion, internet et les lacunes de l’enseigneme­nt de l’histoire seraient aussi des explicatio­ns de tout cela.

Sans doute, mais ces facteurs jouent également en Écosse et en Catalogne, où tous les observateu­rs notent la place importante occupée par les jeunes dans les mouvements souveraini­stes.

On semble aussi perdre de vue que 1,8 million de nouveaux électeurs, sans droit de vote en 1995, se sont ajoutés à l’équation. Qui peut les tenir pour acquis?

Les souveraini­stes doivent-ils attendre, en se lamentant, que les jeunes viennent à eux ou doivent-ils aller à leur rencontre? On change de jeunesse ou on change d’approche? La réponse va de soi.

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