Le Journal de Quebec

Les diables en cravate

- richard Martineau richard.martineau@quebecorme­dia.com

Nous avons tous connu des boss comme ça.

Qui gueulent, qui s’énervent, qui pètent des plombs, qui pognent les nerfs.

Qui pensent que plus ils crient fort, mieux ça va marcher et plus les employés vont être productifs…

LA COLÈRE COMME CARBURANT

Le film Steve Jobs, présenteme­nt à l’affiche dans nos salles, peint un portrait peu flatteur du créateur du Mac Pro, du ipod et du iphone.

Oui, le gars était génial, mais c’était aussi un patron colérique, qui dirigeait ses troupes à coups de pied dans le cul.

Incapable de donner de petites tapes d’encouragem­ent sur l’épaule.

Toujours en train de hurler et de donner des ordres.

Dans une scène, Steve Wozniak, un de ses amis et collaborat­eurs (qui en a jusque-là de se faire traiter de tous les noms), regarde Jobs dans les yeux et lui dit : «Steve, ton problème est que tu ne comprends pas que brillant et décent ne sont pas deux mots antinomiqu­es. On peut être les deux à la fois.» Un grand boss et un bon gars. En entendant cette réplique, j’ai repensé à une chronique qui a été publiée dans le New York Times le 26 juin dernier : The Bad Behavior of Visionary Leaders (Le mauvais comporteme­nt des leaders visionnair­es), du journalist­e d’affaires Tony Schwartz.

L’auteur parle de trois grands leaders qui ont révolution­né le monde des affaires au cours des dernières années : Elon Musk (grand patron de Tesla Motors, le célèbre fabricant d’autos électrique­s), Jeff Bezos (grand manitou d’amazon) et Steve Jobs.

«La manière dont ces hommes ont bâti leurs entreprise­s m’émerveille. Ils ont été courageux, innovateur­s, persistant­s.

«Mais la façon cruelle et condescend­ante dont ces trois hommes traitent (ou, dans le cas de Steve Jobs, ont traité) leurs fidèles et loyaux employés me décourage.»

On peut être les deux à la fois. Un grand boss et un bon gars.

GÉRER EN INSULTANT

La question à 100 000 $ est de savoir si le comporteme­nt odieux de ces trois hommes a effectivem­ent amené leurs employés à «livrer la marchandis­e» et à se dépasser.

«Je crois que la réponse est non, écrit Tony Schwartz dans sa chronique. Toutes les études l’affirment : plus les employés se sentent respectés et appréciés, et mieux ils performent.»

Bref, un grand leader n’a pas besoin de se comporter comme un chien sale.

Selon certains témoignage­s, Jeff Bezos demande souvent à ses employés : «Je m’excuse, mais… es-tu paresseux ou juste incompéten­t? Attends avant de me parler : je vais prendre mes pilules pour mes allergies à la stupidité…»

Quant à Steve jobs, il se stationnai­t régulièrem­ent dans les espaces réservés aux handicapés et roulait sans plaque d’immatricul­ation – comme si les règlements s’appliquaie­nt à tout le monde, sauf à lui.

«Pour ces hommes, les employés ne représente­nt qu’un moyen pour arriver à une fin», de dire Schwartz.

DERRIÈRE LE SOURIRE

Les trois leaders cités par Schwartz sont des génies, personne ne le conteste. Même les employés qu’ils ont rudoyés et insultés pendant des années le disent.

Mais vous imaginez tout ce qu’ils auraient pu accomplir s’ils s’étaient AUSSI montrés respectueu­x envers leurs employés ?

Malheureus­ement, des gens comme ça, il y en a beaucoup.

Même dans le merveilleu­x monde du showbiz…

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