Le réveil de la farce…
Difficile de ne pas sourire à la lecture de cette nouvelle passée inaperçue: le Bloc québécois relance sa campagne «permanente» pour l’indépendance du Québec. On n’en demandait pas tant pour le jour de l’an!
Difficile de ne pas sourire davantage en retrouvant la bonne bouille de Mario Beaulieu, remplacé par Gilles Duceppe le temps des grandes manoeuvres électorales, ramené au quartier général du Bloc maintenant que le champ de bataille est désert.
Mais une fois passée l’envie de rire, on observe avec une certaine lassitude cette nouvelle version du chant du cygne; c’est «réveil de la farce», la version bloquiste de Star Wars.
Plusieurs invoquaient récemment l’émergence d’un «nouveau cycle». Vingt ans après 1995, le Bloc devait ressusciter de ses cendres et remettre Ottawa dans ses petits souliers. Rien de tout cela ne s’avère, mais, autrement symbolique, quand Justin Trudeau débarque dans le Vieux-québec, c’est la cohue…
COUCOU ! LA PATRIE !
On ne les entend plus guère, les patriotes du dimanche, occupés depuis si longtemps à défendre les programmes sociaux et les privilèges syndicaux, toujours imbriqués. Pas étonnant que le vingtième anniversaire de 1995 ait suscité moins d’émoi que la blessure de Carey Price. Le scrutin fédéral du 19 octobre était un présage de cette indifférence.
Aujourd’hui, alors que l’économie chancèle et que les files d’attente s’allongent aux banques alimentaires, ces nouveaux appels à l’indépendance sortent de nulle part comme une corne de brume. C’est la guignolée du pays, le grand porte-à-porte patriotique! «On va être sur le terrain pendant des années», promet Mario Beaulieu par un beau dimanche de décembre.
Les bloquistes devront se faire contagieux et courir d’une maison à l’autre. Parce que 2018 est presque déjà là et que ce rendezvous électoral sera capital pour la suite des choses.
Pierre Karl Péladeau, on le sait, veut faire du Québec un pays. Il lui faudra abattre quelques-unes de ses cartes en 2016 s’il veut être pris au sérieux. Et incarner son idéal un tant soit peu s’il veut qu’on l’écoute.
LE CARAMBOLAGE
La littérature sociopolitique récente dresse un bien triste bilan du nationalisme québécois. L’enlisement est indéniable.
À défaut d’un pays, le Québec s’est offert un État, un gros. Un État avec lequel il embrasse les dogmes progressistes et féministes avec plus d’empressement et de résolution qu’ailleurs. Certains y voient une réaction compensatoire. Mais la pratique du conformisme a un effet pervers. Le «nous» de souche devient encombrant dans l’ouverture obligée aux idées nouvelles et aux nouveaux arrivants, fussent-ils emmerdants avec leurs croyances.
Aujourd’hui, quand des gamins s’amusent à tirer sur le voile d’une femme arabe, l’assemblée nationale se lève trois jours plus tard pour dénoncer l’islamophobie et adopte une motion unanime, une de plus, confirmant la rectitude totalitaire qui prévaut dans la Belle Province.
Plusieurs intellectuels cachent de plus en plus mal leur pessimisme. Le «carambolage historique» semble inévitable, mais les Québécois restent fièrement progressistes et farouchement consensuels.
De braves gens à tous égards, de bonne souche. Méprisés par Sugar Sammy, ridiculisés par Ghislain Picard, mais gentils comme Fred Pellerin. Pour l’heure, le Canada n’a rien à craindre.