Le Journal de Quebec

Les vinyles, plus qu’un élan de nostalgie

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Je rêvais d’un retour aux vinyles depuis que j’avais découvert que mon père avait conservé ses vieux microsillo­ns, ceux que petits, on avait tant écoutés. Un bonheur retrouvé que je partage, à ma grande surprise, avec beaucoup plus de gens que je l’aurais cru.

Année 1990: pour la première fois, les ventes de disques compacts à laser dépassent celles des disques noirs un peu partout dans le monde. On crie à la disparitio­n des vinyles, dont plusieurs compagnies abandonnen­t même la production. Ces oiseaux de malheur avaient pourtant tout faux. Dans les faits, les microsillo­ns ne sont jamais morts. Voyez par vous-mêmes.

Année 2008: réappariti­on marquée du vinyle, dont les ventes ne cessent d’augmenter depuis. À l’occasion du Record Store Day, en avril dernier, la BBC rapportait que 2,1 millions de disques microsillo­ns avaient été acquis par des consommate­urs en 2014. L’augmentati­on des ventes atteint 64 %, la plus importante en 21 ans.

Les hausses se succèdent en fait depuis huit ans, dans ce qu’on identifie comme la plus surprenant­e histoire à succès de l’industrie de la musique, à l’heure où les ventes déclinent en général dans ce domaine.

De mon côté, je me rappelle un nombre incommensu­rable de journées où on a écouté ces fameux disques, fascinés par la table tournante avec son aiguille, et aussi par les magnifique­s pochettes. Vous dire tous les souvenirs qui me sont revenus lorsque j’ai «hérité» de la collection de mon père: c’était digne d’un voyage dans le temps.

C’est aussi le cas de nombreux amateurs de musique qui, après des années de disques compacts et de MP3, ont été tentés par la table tournante. La mienne est de plus équipée comme bien d’autres d’une prise USB qui me permet de transférer la musique sur mon lecteur MP3. Le meilleur des deux mondes.

MÊME LES JEUNES

Avec un tel sujet, je pensais bien mettre le cap sur une chronique nostalgie. Or c’est tout le contraire qui s’est produit. Certes il y a les nostalgiqu­es, qui retournent aux vinyles pour les souvenirs qu’ils génèrent. Mais il y a également des audiophile­s, qui considèren­t que rien ne vaut le son des vinyles. Et surprise, cet engouement pour les disques microsillo­ns concerne aussi les jeunes.

«Je vois beaucoup de jeunes de 18 à 34 ans qui s’intéressen­t et achètent des vinyles, confirme Benoît Huot, qui célébrera cet été les 20 ans de sa boutique CD Mélomane, qui se spécialise dans la vente, l’achat et l’échange de disques compacts, vinyles et autres, neufs et usagés. Souvent, je vois des parents qui viennent avec leurs ados. C’est très rassembleu­r», souligne ce collection­neur qui a observé lui aussi un retour de l’engouement pour les vinyles vers 2008.

Le vinyle, c’est aussi l’occasion de prendre une pause du rythme effréné qui marque nos vies modernes. C’est un peu comme un rituel, un moment de détente. «On prend le temps d’écouter, de respirer, de vivre, note M. Huot. C’est comme si les musiciens étaient là avec nous. On écoute toutes les pièces, en plus, ce qu’on ne fait pas la plupart du temps en format numérique.»

OCCASION DE DÉCOUVERTE­S

D’autres se découvrent une passion et deviennent collection­neurs. C’est le cas de Jean-baptiste Duvignaud, qui organise depuis 2013 la Foire du disque de Québec, dans Saint-roch. Ses amis et lui ne s’attendaien­t jamais à un tel succès. Lui aussi constate que de plus en plus de jeunes se montrent intéressés.

D’origine française, passionné de musique, M. Duvignaud s’est intéressé aux disques à son arrivée au Québec, en 2001. Il a trouvé son premier album en Suède, grâce au web, et a depuis acquis entre 2000 et 3000 disques. Il les trouve surtout dans des magasins indépendan­ts, mais aussi dans les foires, les marchés.

Il n’hésite pas à faire le tour du Québec pour faire des trouvaille­s. Il en a même déjà repêché... dans les poubelles. «Il faut être patient pour trouver ce qu’on cherche, souvent.»

Animateur radio à CKRL depuis 12 ans, il s’emploie à faire découvrir et à promouvoir la musique funk, jazz, soul, et les musiques du monde d’hier et aujourd’hui.

La presque totalité des pièces que vous y entendrez provient de vinyles, une passion qui lui permet de multiplier les découverte­s, et de dénicher des albums oubliés. «Il y en a parfois qui crépitent», fait-il remarquer. Mais ça fait aussi partie de l’expérience, après tout.

BEAUX OBJETS

Les vinyles, souligne M. Duvignaud, sont aussi de beaux objets tangibles, comparativ­ement à la musique sur MP3, qui demeure virtuelle. Certaines pochettes d’album sont d’ailleurs presque des oeuvres d’art, qu’il fait bon regarder et lire.

Bon! allez, je vous quitte, je dois aller retourner mon vinyle, question que la magie puisse continuer d’opérer en ce beau dimanche.

 ??  ?? Jean-baptiste Duvignaud, qui organise depuis 2013 la Foire du disque de Québec, est un mordu de vinyles. Ce Français d’origine n’hésite pas à faire le tour du Québec pour assouvir sa passion.
Jean-baptiste Duvignaud, qui organise depuis 2013 la Foire du disque de Québec, est un mordu de vinyles. Ce Français d’origine n’hésite pas à faire le tour du Québec pour assouvir sa passion.

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