Les pêcheurs

Finaliste du Man Booker Prize 2015, ce remarquable roman d’apprentissage nous plonge directement dans le très noir univers d’une famille nigériane dont le destin basculera à cause d’un fou.

Si monsieur Agwu n’avait pas été muté à Yola, une capitale de l’est du Nigeria beaucoup trop dangereuse pour que toute sa famille ne s’y installe aussi, rien ne serait sans doute arrivé. Car dès que le chat n’est pas là, les souris dansent…

Désormais libres de faire à peu près ce qu’ils veulent, quatre de ses fils commenceront ainsi à taquiner le poisson au bord de l’omi-ala, un fleuve dont on leur a toujours interdit l’accès à cause des innombrables cadavres qui y ont été repêchés. Mais ce qu’ikenna (15 ans), Boja (14 ans), Obembe (11 ans) et Ben (9 ans) ignorent, c’est que les rives de ce fleuve maudit sont également régulièrement hantées par la présence d’abulu le fou, l’un des rares citoyens de la petite ville d’akure qu’il vaut mieux éviter comme la peste.

Véritable épave ambulante, Abulu est en effet surtout réputé pour ses prophéties malveillantes qui, au fils des ans, n’ont hélas jamais été démenties. En affirmant aux frères Agwu que leur aîné allait bientôt être assassiné par un pêcheur, le puissant venin distillé par sa langue de vipère ne tardera donc pas à infecter Ikenna. Et du jour au lendemain, cet ado de nature plutôt docile deviendra encore plus méchant qu’un cobra.

Brillamment racontée par Ben, le cadet du quatuor, la brusque métamorphose d’ikenna nous montrera tour à tour la détresse d’un pays abonné aux coups d’état, le désarroi d’une famille qui ne sait plus à quel saint se vouer pour échapper à la terrible prédiction d’abulu et l’horrifiant destin de ceux qui y survivront.

Les pêcheurs Chigozie Obioma Éditions de l’olivier, 304 pages