Le thriller qui hantera vos nuits
Même s’il s’intitule Rever (sans accent circonflexe sur le premier «e»!), le nouveau pavé de l’écrivain français Franck Thilliez n’a absolument rien de reposant: il se lit d’un trait, qu’on soit ou non en vacances.
Les polars de Franck Thilliez ne sont pas que des page turner. Aussi captivants soient-ils – il n’y a généralement qu’à en lire un ou deux chapitres pour être totalement accro! –, ils réussissent en effet systématiquement à nous apprendre une foule de choses sans jamais nous donner l’impression d’avoir un manuel scientifique entre les mains.
Un véritable tour de force, qui explique d’ailleurs en partie pourquoi on a autant apprécié Rever, son 16e bouquin du genre. Car si on avait déjà entendu parler de la narcolepsie, une maladie provoquant d’irrépressibles accès d’endormissement absolument n’importe quand, on ne savait pas que cette affection neurologique pouvait également entraîner des épisodes de cataplexie (une perte brutale du tonus musculaire se traduisant par l’incapacité de bouger ou de parler pendant de longues minutes) ou une certaine confusion entre le rêve et la réalité. Des symptômes que Franck Thilliez n’hésitera pas à exploiter à fond… ces derniers étant carrément cauchemardesques!
«Je me suis toujours intéressé au sommeil et à ses dysfonctionnements, et après avoir consulté des spécialistes et fait énormément de recherches sur le sujet, j’ai essayé de trouver une histoire autour de ça», explique l’écrivain français, qu’on a joint chez lui à Béthune, une ville située non loin de Lille.
Il a donc d’abord imaginé le personnage d’abigaël, une psychocrimino- logue souffrant d’une narcolepsie sévère, pour ensuite tisser une intrigue si bien ficelée… qu’elle a réussi à nous tenir éveillée deux nuits de suite jusqu’au petit matin!
une histoire à dormir debout?
Même si les gendarmes de la section de recherches de Villeneuve-d’ascq la surnomment Tsé-tsé, Abigaël Durnan ne s’est jamais endormie sur ses lauriers. Extrêmement douée pour tracer le profil psychologique des plus dangereux criminels de France, elle collectionne les faits d’armes, malgré l’étrange maladie dont elle souffre depuis l’âge de huit ans.
Couturée et rafistolée de partout parce qu’elle peut sombrer dans le sommeil ou s’effondrer comme une poupée de chiffon (la cataplexie) à tout moment, Abigaël a longtemps été obligée de combattre bien pire que de simples tueurs, le regard des autres pouvant parfois se révéler nettement plus assassin que n’importe quel meurtrier. «Le narcoleptique que j’ai rencontré pour épaissir le personnage d’abigaël a par exemple énormément souffert toute sa jeunesse durant, du fait qu’on le traitait constamment de fainéant, souligne Franck Thilliez. Quand on est gamin, ce type de commentaires nuisibles peut vraiment miner l’estime de soi en un temps record.»
Chez Abigaël, ils finiront cependant par déboucher sur un zèle infatigable, psychopathes et serial killers ayant, à l’instar de Franck Thilliez, rapidement su éveiller en elle un immense intérêt. «En France, presque toutes les affaires de meurtre sont liées à des histoires d’argent, d’adultères ou d’alcoolisme, ajoute l’écrivain. Il y a toutefois 5 % de cas très étranges, et c’est ce 5 % qui est particulièrement fascinant…»
Lorsqu’un nouveau monstre baptisé Freddy – funeste clin d’oeil au célèbre Freddy Krueger de Wes Craven – empêchera de dormir les parents des trois enfants qu’il a déjà kidnappés, Abigaël fera donc tout naturellement partie de l’équipe chargée de traquer ce nouveau cauchemar ambulant. Un défi de taille, les médicaments qu’elle doit désormais avaler à la pelle pour mettre en veilleuse les principaux symptômes de sa maladie ayant deux terribles effets secondaires: effacer peu à peu ses souvenirs d’enfance et l’entraîner aux limites de la folie, presque plus rien ne lui permettant de faire la distinction entre le monde des songes et le monde réel.
Échapper aux bras de morphée
Chose certaine, aucun romancier novice n’aurait pu rêver d’écrire Rever, la construction de ce thriller qui se déroule entre décembre 2014 et juin 2015 étant singulièrement complexe. «Dans ma tête, j’ai commencé par concevoir l’intrigue de façon linéaire (avec un début, un milieu et une fin!) et en cours de rédaction, j’ai mélangé le tout, précise Franck Thilliez. Dès le départ, j’avais besoin d’un personnage fort que les lecteurs auraient envie de suivre, et en introduisant le personnage d’abigaël six mois après l’accident de voiture qui a tué son père et sa fille de 13 ans, je m’assurais qu’elle avait au moins partiellement surmonté ce drame.»
En revanche, il ne nous dit pas comment Abigaël a pu être la seule à survivre miraculeusement à cet accident ni pourquoi Freddy ne demandera bientôt pas mieux que d’apposer ses griffes sur ses nuits de plus en plus ténébreuses: dans un cas comme dans l’autre, Franck Thilliez nous réserve de terribles surprises.
Rever Franck Thilliez, aux Éditions Fleuve, 600 pages