On a les gouvernements qu’on mérite
Pour tout observateur le moindrement averti qui suit la campagne présidentielle aux ÉtatsUnis depuis l’amorce des primaires jusqu’à aujourd’hui, en passant par les conventions républicaine et démocrate pour le choix de leurs candidats respectifs, une question s’impose.
TRUMP : UNE CARICATURE DE LA POLITIQUE
Au-delà des critiques à l’égard de Hillary Clinton, comment un personnage aussi loufoque, aussi grossier, aussi hostile aux autres, aussi nuisible à la paix sociale, aussi ignorant des enjeux politiques nationaux et internationaux, et aussi diviseur jusque dans ses propres rangs que Donald Trump peut-il se hisser au sommet d’un grand parti, celui d’abraham Lincoln, de Roosevelt et d’eisenhower, et prétendre à la présidence des États-unis, la plus grande démocratie du monde?
Poser la question, c’est y répondre, car au-delà du populisme caricatural de Trump, il y a une crise plus grave qui ronge l’amérique et c’est cette montée inexorable d’une droite religieuse et ultraconservatrice qui y creuse une profonde fracture sociale. Il y a aussi – et c’est également le cas pour toutes les démocraties du monde – cette désaffection inquiétante des citoyens à l’égard de la politique et de leurs élites dirigeantes.
«Dans les démocraties, chaque génération est un peuple nouveau», disait Alexis de Tocqueville. Soit, mais il faut que le «peuple nouveau» soit assez écoeuré de la politique telle qu’elle est menée, assez désemparé face à la crise économique qui perdure, assez traumatisé par les échecs des guerres américaines en Irak, en Afghanistan, en Libye et en Syrie, et assez désemparé face aux frappes de l’état islamique jusque dans ses cités pour remettre son sort entre les mains d’un apprenti sorcier aussi imprévisible que Donald Trump.
«Je vivrai pour toi, je mourrai pour toi», scandent ses partisans.
LA DÉMISSION DES CITOYENS
L’ascension d’un tel néophyte est non seulement due à son immense fortune et à ce qu’il représente, mais surtout à ce «peuple nouveau» d’ultraconservateurs et de défaitistes blancs, peu scolarisés, des pans entiers de citoyens laissés pour compte par des élites politiques déconnectées de la réalité qui ont érigé l’hypocrisie et la langue de bois en mode de gouvernement.
Du coup, la démagogie d’un électron libre comme Trump prend l’allure d’un «franc-parler» qui les rassure. Ils voient dans son isolationnisme économique une stratégie pour protéger leurs emplois et dans ses bravades verbales la marque d’un «sauveur» prêt à brandir son glaive pour tailler les terroristes en pièces et restaurer la grandeur de l’amérique. Ça en dit long sur leur désarroi!
La grande perdante, dans cette politique spectacle, c’est la démocratie ellemême. Une démocratie vidée de son idéal, de ses débats d’idées, réduite à une mécanique dysfonctionnelle où de moins en moins d’électeurs se donnent la peine d’aller voter, alors que d’autres, plus dégoûtés, boudent carrément les urnes.
Ça en dit long sur la responsabilité des citoyens qui portent ces gouvernements au pouvoir!