Le Journal de Quebec

Drames estivaux

- CLAUDE VILLENEUVE blogueur ∫ des Spin Doctors Ex-rédacteur de discours de Pauline Marois claude.villeneuve@quebecorme­dia.com @vclaude

Le ralentisse­ment estival de l’actualité procure souvent à des événements tragiques un retentisse­ment encore plus fort.

Tranchant brutalemen­t avec les plaisirs de cette si courte saison, ces drames nous touchent d’autant plus. Rares sont ces périodes chaudes qui ne nous ont pas laissé de terribles souvenirs qui s’appellent Marie-soleil ou Mégantic.

LE DRAME EN DIRECT

Mardi après-midi, c’est en direct que nous avons vu ce camion-citerne brûler sur l’autoroute Métropolit­aine. Notre coeur s’est serré en regardant cet homme désespéré courir autour du tracteur pour délivrer un inconnu d’une prison de tôle.

On sait aujourd’hui que Gilbert Prince était âgé de 59 ans. C’était un amoureux, un père et un grand-père adoré. On le décrit comme un employé et un collègue apprécié au sein de l’entreprise EGGR.

Le bon samaritain s’appelle Carol Bujold, 50 ans. Son patron dit qu’il a le coeur sur la main, lui qui devra faire la paix avec des images terribles et un sentiment d’impuissanc­e injuste compte tenu du courage dont il a fait preuve.

Leurs visages nous étaient inconnus jusqu’à avant-hier. Aujourd’hui, ils nous rappellent tant d’hommes que nous connaisson­s, derrière le volant d’un camion.

LA VIE FAUCHÉE

Le lendemain matin, à Québec, nous apprenions qu’une dame avait été fauchée sur le boulevard Laurier. C’est avec horreur que nous avons su plus tard qu’il s’agissait d’une femme de 27 ans enceinte de 39 semaines.

Elle sortait d’un examen prénatal au CHUL en compagnie de son conjoint. Le personnel médical s’est précipité pour prendre soin d’elle et délivrer l’enfant du ventre nourricier qui l’avait jusqu’ici protégé.

En apprenant une telle nouvelle, on fait tous mentalemen­t le tour de tous les couples que l’on connaît qui attendent la cigogne. Difficile de retenir ses larmes en découvrant le visage de Marie-pier Gagné, rayonnante sur ses photos de «bedaine».

La vie avait ses droits, on les lui a reti- rés. Un papa retournera à la maison sans son amoureuse et nous devons encore prier pour qu’il soit accompagné d’une petite fille en santé, mais à qui on devra conter un jour une bien pénible histoire au sujet de sa naissance.

SOLIDARITÉ VIRTUELLE

Sur les réseaux sociaux, au travers des insultes et du harcèlemen­t, on trouve aussi un comporteme­nt magnifique­ment humain. Il s’agit de l’empathie.

Ces drames vécus par des inconnus nous touchent parce qu’ils renvoient à des situations ou à des gens que nous côtoyons. Oui, il y a le voyeurisme, le drôle de sentiment que l’on ressent en lisant les mots de proches qui s’adressent à la deuxième personne à l’être cher disparu.

Facebook leur offre un endroit de plus pour dire leur peine, mais aussi pour qu’elle soit entendue.

Signe des temps? Étrangeté de la vie moderne? Je ne sais pas. Mais une chose est certaine, c’est que cette semaine, deux camionneur­s infortunés et une petite famille brisée font l’objet de toute notre solidarité.

Puissent-ils, comme tous leurs proches, ressentir notre étreinte.

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