Découvrir le monde... un pas à la fois
À l’âge où bien des aventuriers raccrochent leur sac à dos, l’écrivain français Olivier Bleys, auteur d’une trentaine d’ouvrages, a choisi d’entamer un tour du monde à pied, par étapes. Avec intelligence et générosité, il raconte les sept premiers volets
Chaque étape de son aventure annuelle dure environ un mois et le conduit toujours un peu plus loin vers l’est. Depuis 2010, année de son départ du petit village français de Pampelonne, il a franchi plusieurs étapes: Albertville, Andermatt, Tresenda, Venise, Dubrava Krizovljanska en Croatie, Miskolc en Hongrie.
Il décrit dans un style vivant, fin et authentique, sa longue marche à travers la nature et les villes, sa quête quotidienne de nourriture et d’un endroit pour passer la nuit, ses tracas et ses joies de marcheur, ses rencontres. Tellement bien raconté qu’on a le sentiment de marcher à ses côtés, d’avoir froid, chaud, faim, soif et parfois mal partout. On rit, on est ému, on se questionne... et plus on lit, plus on a la bougeotte.
« REGARD PLUS DISTANT »
Le texte est issu de notes de blogues. «J’ai récupéré l’ensemble de ces textes et je les ai épaissis, je les ai nourris de toutes sortes de digressions, de notes, d’extraits de mon carnet pour donner une tournure qui soit moins factuelle, explique-t-il. Pas seulement une suite d’événements, mais aussi un regard plus distant sur l’expérience, le voyage, la marche, tout ce que j’ai pu rencontrer.»
Olivier pratiquait déjà la marche, de manière discontinue, car son père était chasseur alpin, ce qui en France correspond à militaire de montagne. «J’étais déjà dans un milieu favorable et je voyageais beaucoup. C’était une dimension qui était présente dans mes écrits, dans la mesure où tous mes romans, presque, avaient pour cadre des pays étrangers, des cultures d’ailleurs.» La lecture de Concerto pour la main morte ou Le Maître de café confirme très bien ses dires.
La rencontre d’un marcheur, Bernard Ollivier, lui a donné l’impulsion de vivre sa propre aventure. «C’était pour moi le moyen de la réaliser, un petit peu sur le tard... paradoxalement à l’âge où les vrais aventuriers raccrochent le sac à dos et vivent des expéditions moins dangereuses. Moi, c’est l’inverse: c’est à cet âge-là que je me suis vraiment mis en route. Et je dois dire que ça m’a beaucoup changé, sur des tas de plans.»
BIENFAITS
Physiquement, il peut témoigner des bienfaits de la marche: fini le mal de dos et bonjour la forme. «En marchant, j’ai l’impression de retrouver, physiquement, ce qui est notre nature et notre comportement normal. Le corps humain est vraiment conçu pour la marche, dans ses proportions, dans sa musculature, dans sa largeur du bassin. S’abstenir de marcher, c’est ça qui est anormal. Inversement, quand on se met à marcher assidûment, on a l’impression de rejoindre une sorte de vérité du corps.»
Au niveau de l’esprit, Olivier se sent beaucoup mieux en marchant. «Lorsque je marche en pleine nature, des semaines durant, il y a une sorte d’harmonie qui se développe, de plus grande ouverture et disponibilité aux autres. Les bienfaits vont jusqu’à une sorte d’épanouissement spirituel. Ça ne m’étonne pas qu’à peu près tous les grands guides spirituels de l’humanité aient pratiqué la marche ou aient été des marcheurs assidus.»
L’année dernière, l’écrivain-randonneur a marché, seul, 784 kilomètres. En ce moment, il marche, avec deux compagnons, en Hongrie puis en Ukraine pour accomplir la huitième étape de ce défi original.
» Olivier Bleys est auteur d’une trentaine d’ouvrages traduits en 10 langues, dont Le maître de café et Discours d’un
arbre sur la fragilité des hommes, qui a figuré dans la première sélection du prix Goncourt. » Il a été fait Chevalier des Arts et des
Lettres en 2014. » Début septembre, il publiera Manifeste
de la marche, qui traite des tours de villes (en suivant les limites géographiques) qu’il fait. » Il développe un projet d’opéra pour L’opéra de Bordeaux, Les Bains maca
bres, avec le compositeur Guillaume Connesson.