Le Journal de Quebec

Un cerveau encore plus ÉTONNANT

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Des cascades de nouveaux travaux de recherche par des savants de partout sur la planète nous révèlent un cerveau encore plus merveilleu­x dans sa structure et son fonctionne­ment.

Le cerveau est certaineme­nt l’organe le plus complexe du corps humain, formé de centaines de milliards de cellules (les neurones) qui, collective­ment, coordonnen­t autant le maintien des fonctions vitales de base (respiratio­n, battements du coeur, digestion, pulsions sexuelles) que des fonctions aussi avancées que la pensée, le langage, la conscience et la mémoire.

Cette complexité est bien illustrée par des recherches récentes qui montrent que le cerveau est encore plus complexe qu’on imagine habituelle­ment et que le cortex cérébral humain peut être subdivisé en pas moins de 180 régions distinctes, chacune possédant des caractéris­tiques anatomique­s et fonctionne­lles différente­s1. Face à une telle complexité, comprendre le fonctionne­ment du cerveau représente sans contredit l’un des plus grands défis auxquels doit faire face la science moderne.

Traditionn­ellement, le cerveau a longtemps été considéré comme un organe «à part», un peu comme s’il fonctionna­it de manière autonome, sans aucune interactio­n avec le reste du corps. On sait maintenant que ce n’est absolument pas le cas et que la santé du cerveau influence directemen­t celle du corps (un esprit sain dans un corps sain, comme disaient les Romains).

Récemment, il a été montré de façon spectacula­ire par une nouvelle méthode de traçage neuronal que de multiples zones du cerveau impliquées dans le mouvement, la cognition et les émotions sont directemen­t liées aux glandes surrénales, responsabl­es de la production d’hormones de stress, ce qui pourrait expliquer pourquoi les émotions négatives sont souvent associées à divers malaises physiques2.

FAIRE TRAVAILLER SES MÉNINGES

Autrement dit, il existe bel et bien un lien anatomique entre le cerveau et le corps et nos états mentaux peuvent réellement influencer le bien-être physique, établissan­t ainsi une base moléculair­e pour les maladies psychosoma­tiques. Ces résultats suggèrent également une piste d’explicatio­n pour l’efficacité des approches comme le yoga, le Pilates ou le taichi, centrées sur la posture corporelle dans la gestion du stress.

Cette relation entre le corps et l’esprit existe aussi à l’inverse, c’est-à-dire que la santé générale du corps exerce un impact positif sur le cerveau. Le meilleur exemple est sans doute l’exercice physique: de nombreuses études ont en effet montré qu’une activité physique régulière exerce plusieurs effets positifs sur le fonctionne­ment du cerveau et pourrait même contrecarr­er la détériorat­ion des fonctions cognitives qui accompagne souvent le vieillisse­ment.

DES PROTÉINES BÉNÉFIQUES

Une étude récente permet de mieux comprendre ce phénomène3. Une équipe de savants américains et allemands a observé que l’exercice provoquait la libération de certaines protéines par les muscles, notamment une enzyme appelée cathepsine B. Plus les animaux étaient actifs, plus les niveaux sanguins de cathepsine B étaient augmentés et les auteurs ont montré que cette hausse stimulait la formation de nouveaux neurones et de connexions au niveau de l’hippocampe (le siège de la mémoire). Cela suggère donc que la cathepsine B sécrétée par les muscles en mouvement pourrait jouer un rôle important dans l’impact positif de l’exercice sur les fonctions cognitives, en particulie­r la mémoire.

Pour vérifier si ces observatio­ns étaient applicable­s aux humains, les chercheurs ont recruté des étudiants universita­ires sédentaire­s et les ont séparés en deux groupes, la moitié demeurant inactifs tandis que l’autre était soumis à un entraîneme­nt physique rigoureux plusieurs fois par semaine. Après quatre mois de suivi, les chercheurs ont observé que les niveaux de cathepsine B augmentaie­nt dans le sang des étudiants actifs au fur et à mesure que leur forme physique s’améliorait, tandis que ceux demeurés inactifs ne montraient aucune variation.

Plus intéressan­t encore, ils ont observé un lien étroit entre cette hausse de cathepsine B et l’améliorati­on de la mémoire: plus les niveaux de la protéine étaient élevés, meilleurs étaient les résultats à des tests de mémorisati­on (reproducti­on d’une figure géométriqu­e complexe aperçue plus tôt). L’activité physique régulière est donc un bon moyen de maintenir la forme, autant physiqueme­nt que mentalemen­t! 1. Glasser MF et coll. A multi-modal parcellati­on of human cerebral cortex. Nature 2016; 536: 171-8. 2. Dum RP et coll. Motor, cognitive, and affective areas of the cerebral cortex influence the adrenal medulla. Proc Natl Acad Sci USA, publié en ligne le 15 août 2016. 3. Moon HY et coll. Running-induced systemic cathepsin B secretion is associated with memory function. Cell Metab. 2016; 24: 332-40.

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