DES HISTOIRES QUI L’ONT MARQUÉ
Famille d’ingénieurs sans toit Des campements à Gatineau Sortir de la misère
Cas hors du commun, François Saillant se souvient d'une famille d'ingénieurs avec quatre enfants qui s’est retrouvée à la rue lors de la crise du logement de 2001. Ce sont normalement des gens avec des revenus plus faibles ou sans emploi qui se retrouvent dans ce genre de situation, soutient-il. «Mais lors de la crise du logement, on en était rendu à re- distribuer le peu d’appartements locatifs vacants aux plus offrants au moyen d’enchères. Ça a affecté une part plus grande de la société. C’est un des moments marquants de ma carrière. On était en pénurie extrême», dit le militant. C’est d’ailleurs l’une des rares fois où le FRAPRU a agi directement auprès de locataires dans le besoin.
En juillet 1983, de nombreux habitants de Gatineau et de Hull, dont une mère de famille fonctionnaire du gouvernement fédéral, se sont retrouvés sans logis et ont dû camper dans un parc devant les locaux du comité de logement du secteur, raconte M. Saillant. «Ç’a duré pendant des semaines, ça a fait scandale. Certains ont même dû squatter des écoles. C’est à ce moment que j’ai rencontré cette fonctionnaire fédérale, qui est devenue une bonne amie avec le temps. Elle s’était retrouvée à la rue, elle aussi», dit-il. Les autorités ont pris près de deux mois avant de reconnaître le problème et d’offrir des suppléments au loyer d’urgence aux «campeurs» qui, dans bien des cas, ont trouvé des appartements vacants dans des zones excentrées de la ville. «C’est vraiment un des cas extrêmes qu’on a connus», admet-il. La fonctionnaire fédérale a pour sa part fini par trouver une place dans une coopérative d’habitation.
François Saillant a aussi vu des gens dans des situations extrêmement précaires sortir de leur misère grâce aux logements sociaux. «Ils étaient sans le sou, ils vivaient dans des taudis et fréquentaient les banques alimentaires. Une personne en état de survie n’a pas le temps de penser à améliorer son sort. Mais leur vie a changé du tout au tout quand ils ont eu accès à un appartement abordable, raconte-t-il. Ils étaient encore pauvres, mais au moins, ils n’avaient plus à utiliser 50 ou 60 % de leurs revenus pour payer leur loyer. Ça change la vie.» Il se souvient d’ailleurs avoir été invité à don- ner des conférences devant l’association des propriétaires d’appartements du Grand Montréal au sujet du logement social. La plupart des propriétaires de ce regroupement se positionnent toutefois contre ces logements, sous prétexte qu’ils encouragent la paresse, dit-il. «Ça virait toujours à la confrontation… jusqu’à ce que l’un d’eux se lève pour raconter sa propre histoire. Il avait vécu la misère après ses études et s’en était sorti grâce à un logement social. Il avait ainsi pu trouver un emploi et, plus tard, devenir propriétaire d’un immeuble locatif», raconte M. Saillant, le sourire aux lèvres.