Vendre Lejournal à la criée
Dans les années 1960 et 1970, Gilles Francis écoulait environ 750 exemplaires par jour
Beau temps mauvais temps, Gilles Francis a vendu Le Journal de Québec à la criée à l’angle de la rue Marie-de-l’incarnation et du boulevard Wilfrid-hamel dans les années 1960 et 1970.
M. Francis, 65 ans, se remémore cette période avec le sourire. Débrouillard comme pas un, il était tout jeune lorsqu’il est devenu camelot, mais c’est surtout à la criée qu’il était le meilleur.
«J’ai abandonné le métier parce que la police était sur mon dos. On courait à travers les autos et c’était rendu dangereux», dit-il.
Son record, il l’a atteint en 1970 au décès de Pierre Laporte: 1144 exemplaires vendus. Une journée normale, c’était quand même 750 copies. Il fallait le faire.
BEAUCOUP DE MONNAIE
Le Journal se vendait alors 10 cents. M. Francis empochait 4 cents par exemplaire, ce qui représentait un revenu de 30 $ par jour avec beaucoup, beaucoup de monnaie à rouler.
«C’est ma mère qui roulait. C’était l’experte! C’est avec ce salaire-là que j’ai payé ma première voiture neuve, une Chevrolet Nova 1975 qui valait, si je me souviens bien, 4995 $.»
Pour écouler ses journaux, M. Francis faisait beaucoup d’efforts. Debout de bon matin, il commençait sa distribution de porte en porte à 4 h pour être libre de vendre ses journaux à la criée à partir de 5 h.
« Le Journal de Québec, c’est toute ma vie. Jamais je n’oublierai ça. J’en parle et c’est comme si c’était hier», a-t-il dit.
Il a arrêté du jour au lendemain. Ses habitués le croyaient mort. Il a plutôt choisi de mettre fin à ses activités après avoir été témoin d’un accident. Un camion de propane est entré en collision avec une voiture qui avait ralenti pour acheter Le Journal. Le conducteur est parti sur une civière en promettant à M. Francis de le revoir en cour. La menace n’a jamais été mise à exécution, mais ça a suffi à le décourager.
AUCUN JOURNAL INVENDU
M. Francis n’a jamais manqué un matin. Il n’a jamais non plus rapporté de journaux invendus. Il restait à son coin de rue tant qu’il n’avait pas écoulé ses copies, même par des températures extrêmes.
«Le secret d’un bon vendeur, c’est qu’il ne faut pas être gêné! J’ai vendu du chocolat de Pâques et je vends encore des effigies durant le Carnaval. Ma fille dit que je pourrais vendre des réfrigérateurs aux Esquimaux!»