Un passé pas si lointain
Les mots de Michel Tremblay résonnent toujours
Michel Tremblay a écrit À toi, pour toujours, ta Marie-lou en 1970. Quarante-sept ans plus tard, les mots sont aussi forts, même si l’univers entourant cette famille ouvrière est chose du passé.
À l’affiche jusqu’au 18 mars à La Bordée, la proposition revisitée par le metteur en scène Alexandre Fecteau est mordante et frappe avec éclat.
À toi, pour toujours, ta Marie-lou raconte l’histoire de Manon et Carmen, deux soeurs qui se retrouvent 10 ans après le décès tragique de leurs parents.
La pièce dépeint une réalité où les familles ouvrières en arrachaient dans un Québec sous l’emprise de la religion catholique. Un monde dur où les perspectives d’avenir étaient loin d’être intéressantes. Un univers qui résonne encore parce qu’il présente un passé qui n’est pas si lointain.
À toi, pour toujours ta Marie-lou, c’est l’histoire d’un couple, Léopold et MarieLouise, qui s’aime mal et qui ne s’est même peut-être jamais aimé. Un état d’être qui a eu des effets sur leurs deux filles.
Une Carmen (Catherine Simard), devenue chanteuse western et qui a réussi à s’extirper de cet univers, en opposition à une Manon (Marianne Marceau), pieuse, qui habite dans le logement de son en- fance et qui est incapable de se détacher de son enfance difficile.
EXCELLENTE DISTRIBUTION
L’arrivée prochaine d’un quatrième enfant dans la famille bouleverse l’état des choses avec un appartement trop petit, un salaire insuffisant et un climat lourd et malsain.
Le texte se déploie avec quatre comédiens qui évoluent en même temps et dans deux époques différentes. Léopold et Marie-louise interagissent en 1961, Manon et Carmen en 1971, et les deux soeurs revivent, parfois, certaines altercations entre leurs parents.
Éva Daigle, Hugues Frenette, Marianne Marceau et Catherine Simard excellent sur les planches.
Débarrassé de la coupe Longueuil qu’il arborait dans Le Songe d’une nuit d’été, Hugues Frenette est dur et bouleversant dans la peau d’un homme peu éduqué, perdu et qui trouve son unique réconfort en s’engourdissant à la taverne.
Un moment habilement recréé dans un décor où un plateau tournant se transforme en logement, usine et taverne. On le déteste pour finir par comprendre un peu mieux son mal de vivre.
À toi, pour toujours ta Marie-lou, c’est l’histoire de petites gens qui vivaient dans un contexte difficile, et la langue de Tremblay, claire et forte, permet de comprendre que le Québec a évolué et changé.