Le Journal de Quebec

Terrifiée que les meurtriers allégués de son fils s’en tirent grâce aux délais

- Michaël Nguyen l Mnguyenjdm

Une mère inconsolab­le depuis le meurtre de son fils il y a presque quatre ans est terrifiée à l’idée que les accusés puissent être libérés à cause des délais judiciaire­s.

«Mon fils a été tué une première fois et là, la justice risque de le tuer une deuxième fois», lance Hanim Sen en pleurant.

En mai 2013, Fehmi Sen avait été tué par balle, dans le quartier Côte-desNeiges. Le jeune homme dans la vingtaine aurait été ciblé par erreur. Il n’a d’ailleurs aucun antécédent judiciaire et était une victime innocente, selon nos informatio­ns.

Depuis ce drame, la famille du défunt pleure sa mort tous les jours. Mme Sen jure qu’elle essaye de rester forte pour ses enfants, mais elle ne peut s’empêcher de fondre en larmes en tenant dans ses bras des objets ayant appartenu à son fils, comme une taie d’oreiller ou un mouchoir.

Et toute la famille attend avec impatience un verdict pour les aider à aller de l’avant.

«Je veux pouvoir aller sur la tombe de mon frère et lui dire que justice a été rendue, explique Cenghiz Yanar, le frère du défunt. Ma mère a mal, plus c’est long, plus on souffre.»

ARRÊT JORDAN

Le procès des quatre accusés est prévu pour janvier 2018, mais trois des accusés ont récemment demandé un arrêt des procédures en invoquant l’arrêt Jordan de la Cour suprême.

Ce jugement impose une limite de 18 ou 30 mois d’attente selon le type de procès, à moins de circonstan­ces particuliè­res. Les statistiqu­es les plus récentes indiquent qu’au total, 488 demandes ont été déposées.

«Je comprends que la justice est encombrée de dossiers, mais il faut rappeler que derrière ceux-ci, il y a des fa- milles qui attendent, c’est important que le monde ne perde pas confiance dans notre système», affirme Behice Yanar, la soeur de M. Sen.

La requête de Shorn Carr, Marlon Henry et Rakesh Jankie, âgés de 27 à 35 ans, a été entendue la semaine passée et une décision est attendue pour avril.

Mais cette attente est insupporta­ble pour la famille du défunt. «Je n’ai plus de vie et la justice, l’arrêt Jordan, ça a aggravé ma santé, déplore Mme Sen. Ça a coupé mon souffle. La justice m’enterre! C’est déjà dur pour une mère de voir les accusés, alors imaginez quand on se dit qu’ils ne seront peut-être pas jugés!»

« DÉBOUSSOLÉ­S »

Cette peur d’un arrêt des procédures à cause des délais est encore plus difficile à vivre pour les proches, car ils n’ont que de bons mots pour la police et les procureurs dans le dossier.

«On sait qu’ils prennent leurs dossiers à coeur, explique Behice Yanar. On avait espoir que la justice allait s’en venir, mais là, on est déboussolé­s, on a peur, on revit les mêmes sentiments des premiers jours, quand mon frère est mort. On ne peut pas accepter ça.»

Behice Yanar espère qu’en faisant une sortie publique, l’état prendra conscience de l’impact que les délais judiciaire­s peuvent avoir sur les proches des victimes, et même pour les accusés et les familles de ceux-ci.

«Je veux la j ustice, rien d’autre, conclut la mère de Fehmi Sen. Je ne veux pas que d’autres mères pleurent comme moi.

 ??  ?? Hanim Sen, la mère de Fehmi Sen, est inconsolab­le depuis que son fils, ciblé par erreur, a été tué en mai 2013. Elle pleure sa mort tous les jours en regardant son portrait et en espérant que justice soit faite.
Hanim Sen, la mère de Fehmi Sen, est inconsolab­le depuis que son fils, ciblé par erreur, a été tué en mai 2013. Elle pleure sa mort tous les jours en regardant son portrait et en espérant que justice soit faite.
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