Le Journal de Quebec

Tempête : les autres vont porter secours

- richard Martineau richard.martineau@quebecorme­dia.com

C’est Raphaël, un auditeur de la méchante radio de Québec, qui m’a mis la puce à l’oreille.

«Lisez Le Point de bascule de Malcolm Gladwell, et vous allez comprendre pourquoi autant de gens dans le besoin ont été abandonnés par le système lors de la tempête de neige…», m’at-il dit.

Alors je suis allé chercher le livre, je l’ai lu et j’ai compris…

UNE EXPÉRIENCE SCIENTIFIQ­UE

De m’expliquer Raphaël: «Dans son livre, Gladwell démontre que tu as moins de chance de recevoir de l’aide lorsque tu te fais agresser dans une rue bondée que lorsque tu te fais agresser dans une rue peu fréquentée.

«La raison est simple: dans une rue bondée, les gens se disent tous que quelqu’un dans la foule va finir par agir et par te venir en aide. Alors que dans une rue déserte, la seule personne qui passe va se sentir tout de suite interpellé­e.»

Malcolm Gladwell, qui est journalist­e au New Yorker Magazine (qui est, à mon humble avis, le meilleur journalist­e américain avec Michael Lewis, l’auteur de Moneyball et The Big Short), appelle ça «le problème du spectateur».

Il y a quelques années, deux psychologu­es de New York ont effectué une série de tests pour savoir comment les gens se comportaie­nt dans un contexte de crise.

Un homme faisait semblant d’avoir une crise d’épilepsie devant un individu choisi au hasard.

Lorsque l’individu qui était témoin de la crise de l’acteur était seul, il lui venait en aide 85 % du temps.

Mais lorsqu’il était entouré de trois autres personnes ou plus, il lui venait en aide seulement 31 % du temps.

Conclusion: plus il y a de gens qui savent que tu es dans le trouble, moins tu as de chance d’être secouru.

Plus il y a de gens, moins on t’aide...

DU MONDE À LA MESSE

C’est exactement ce qui s’est passé lors de la tempête.

Les fonctionna­ires, les ministres, le ministère des Transports, le ministère de la Sécurité publique, la SQ, les municipali­tés, le Service de la sécu- rité civile, les déneigeurs, les ambulancie­rs, les pompiers, le PM… Y avait du monde à la messe! Avec autant de personnes responsabl­es, c’est sûr que quelqu’un va se lever et porter secours aux automobili­stes pris dans la neige, non? Et bien, justement… non. A se disait que B allait le faire, B se disait que C allait le faire, C se disait que D allait le faire… comme ça jusqu’à Z.

Plus il y a de monde qui est censé aider, moins de gens aident. C’est scientifiq­ue. On croit que plus la structure est grosse, plus on est protégé. Faux.

En fait, c’est le contraire: plus l’organigram­me est échevelé, et plus tu vas macérer dans ta merde quand tu vas être dans le trouble.

DU GROS NIAISAGE

On pourrait appeler ça «le syndrome du Québec».

L’efficacité de la réponse est inversemen­t proportion­nelle au nombre de fonctionna­ires assignés.

Plus il y a d’employés, plus il y a de chefs et plus il y a de sous-fifres, et plus ça niaise.

Plus tu passes du temps dans ta pisse…

Quatre-vingt-quatorze étapes pour répondre à une crise.

Tout est là.

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