Le Journal de Quebec

Rivalité en demi-teinte

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Pour la première fois en 25 ans d’histoire, le Canadien et les Sénateurs se disputeron­t le premier rang de leur division en fin de semaine. Cette série aller-retour sera suivie d’un troisième affronteme­nt samedi prochain, au Centre Bell.

Ces trois matchs devraient donner lieu à des duels intéressan­ts, mais permettron­t-ils d’accroître la rivalité entre les deux équipes?

Car malgré la proximité des marchés dans lesquels elles évoluent, on ne peut pas dire que les confrontat­ions les opposant déchaînent les passions. C’est à l’image du hockey qui se pratique dans la Ligue nationale.

Les bagarres ne sont plus partie prenante du jeu, mais difficile de s’élever contre ça maintenant qu’on est plus conscient de la dangerosit­é des coups à la tête.

Par contre, on ne voit plus de guerres de clans.

LES FROGS CONTRE LES ANGLAIS

À l’époque où le Canadien était composé majoritair­ement de joueurs francophon­es, c’était les Canadiens français, comme on disait dans le temps, contre les Anglais qui nous surnommaie­nt, quant à eux, les Frogs.

Les amateurs qui ont été témoins des affronteme­nts entre le Tricolore et les Maple Leafs dans le temps que la LNH était constituée de six équipes s’en souviennen­t. C’était la bataille entre les deux solitudes.

Il y a eu ensuite les années où le hockey était dominé par une violence extrême.

Les matchs contre les Big Bad Bruins et les Broad Street Bullies de Philadelph­ie étaient souvent ponctués de débordemen­ts qui faisaient le délice des amateurs.

PLUS GRANDE RIVALITÉ JAMAIS VUE

Mais rien n’égalera jamais la rivalité qui existait entre le Canadien et les Nordiques, qui allait au-delà du sport.

Les propriétai­res des deux équipes, la brasserie Molson à Montréal et la brasserie O’keefe du côté de Québec, se disputaien­t le marché de la bière et les droits de télédiffus­ion des matchs au Québec.

Les Nordiques, avec leurs nombreux joueurs francophon­es, projetaien­t l’image nationalis­te du Québec.

Le Canadien personnifi­ait le fédéralism­e.

Or, même les joueurs qui provenaien­t de l’extérieur du Québec étaient aussi impliqués que les nôtres.

Les joueurs du Tricolore voulaient la tête de Dale Hunter et ceux des Nordiques voulaient faire la fête à Mario Tremblay.

C’est sans oublier Michel Bergeron et Jacques Lemaire qui n’avaient aucun respect l’un pour l’autre.

Les partisans des deux camps se détestaien­t souveraine­ment. Les matchs du temps des Fêtes divisaient des familles. Au point où les deux organisati­ons s’étaient entendues pour mettre fin à la série aller-retour qu’elles se livraient les 30 et 31 décembre.

La rivalité est devenue plus civilisée après le match du Vendredi saint, lors des séries de 1984. Mais encore là, il n’en fallait pas gros pour mettre le feu aux poudres. La tension était si grande que les joueurs en disaient le moins possible aux médias.

Je revois encore cette page frontispic­e du Journal de Québec qui titrait le jour d’un match au Colisée: Confrontat­ion Canadien-nordiques: Guerre du silence – 10 pages.

Nous avions été plusieurs à nous interroger sur notre métier, ce matin-là.

MIEUX OU PAS ?

On ne revivra plus jamais ça. Certains affirment que c’est mieux ainsi, d’autres disent s’ennuyer de tout ça. Comme quoi tout le monde ne peut être sur la même longueur d’onde.

Le Canadien et les Sénateurs se sont affrontés en séries deux fois en trois ans. La première fois, en 2013, Eric Gryba avait assommé Lars Eller avec une mise en échec au centre de la patinoire et Brandon Prust avait traité Paul Maclean de gros morse aux yeux globuleux.

Les deux incidents n’ont pas eu d’effet sur la suite des choses entre les deux équipes. C’est comme si rien n’était arrivé.

De plus, les quatre noms mentionnés plus haut ne sont plus là depuis un certain temps.

Les temps changent, le hockey change. L’informatio­n est aseptisée. Les joueurs et les entraîneur­s en disent le moins possible pour ne pas allumer de feu.

Le jeu a beau être rapide, les joueurs athlétique­s, le spectacle manque trop souvent de couleur. Les premiers marqueurs de la ligue dépasseron­t à peine le plateau des 90 points cette saison.

C’est peu quand on pense aux joueurs de grand talent que sont Sidney Crosby, Connor Mcdavid, Patrick Kane, Evgeni Malkin et Alex Ovechkin.

Le hockey de la LNH, c’est ça en 2017.

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On ne peut pas dire que les confrontat­ions entre les Sénateurs et le Canadien déchaînent les passions.

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