Le Journal de Quebec

Le juge en chef blâme Ottawa

- MICHAËL NGUYEN

Au lendemain de la libération d’un Montréalai­s, accusé d’avoir égorgé sa femme, en raison des délais judiciaire­s, le juge en chef de la Cour supérieure du Québec blâme le fédéral pour sa lenteur à remplacer 14 postes de juges encore vacants.

«Le provincial a fait son travail, il est maintenant temps qu’ottawa agisse», affirme sans détour le juge en chef Jacques R. Fournier.

En juillet dernier, la Cour suprême du Canada avait rendu l’arrêt Jordan, qui limite le temps d’attente pour qu’un accusé subisse un procès. Dans les causes de meurtre, les délais ne peuvent pas dépasser 30 mois, sauf exception.

Quelques mois plus tard, le juge en chef avait prévenu que des procès pour meurtre étaient à risque, entre autres à cause du manque criant de juges.

«La catastroph­e appréhendé­e s’est réalisée hier [jeudi]», a-t-il dit, en référence au premier accusé de meurtre au Québec à être libéré à cause des délais judiciaire­s.

Jeudi, un juge a en effet ordonné la libération de Sivalogana­than Thanabalas­ingham, qui était accusé du meurtre au deuxième degré de sa femme. Les délais ont été trop longs, a tranché le juge Alexandre Boucher.

LENTEUR FÉDÉRALE

Le juge en chef Fournier ne croit pas qu’ottawa sente l’urgence de la situation. Il manque 14 juges à la Cour supérieure du Québec, mais les nomination­s [qui relèvent du fédéral] arrivent au «compte-gouttes», dit le magistrat. Il donne l’exemple de trois postes ajoutés en 2012 toujours vacants.

Et comme les ressources sont mises au criminel, les délais dans des causes civiles ou familiales vont commencer à s’allonger, prévient-il.

«Je fais tout ce qui est possible, mais j’ai besoin de nouveaux juges, la population en a besoin, explique le magistrat. Car c’est la population qui est desservie.»

À L’ÉCOUTE

Le juge en chef ajoute également que si la population au Québec ne cesse d’augmenter, le nombre de juges stagne.

«Il y a plus de députés que jamais, mais les effectifs de la magistratu­re ne suivent pas, dit-il. Il faut en rajouter, sinon les problèmes [de délais] vont persister. Et je suis certain que la population ne veut pas ça.»

La ministre fédérale de la Justice Jody Wilson-raybould n’a pas voulu donner d’entrevue au Journal. Présente en Chambre hier après-midi, elle est partie en esquivant les journalist­es.

Dans un courriel au Journal, elle a déclaré qu’elle allait rencontrer ses homologues des provinces «ce mois-ci» pour «discuter des effets de l’arrêt Jordan». Elle espère pourvoir «sous peu» aux postes vacants.

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