Rigueur budgétaire, fouillis routier
Tous les lecteurs du Journal ont dû faire la même face que moi en lisant la citation du ministre des Transports «L’état des routes s’améliore». Fait cocasse, Laurent Lessard contredisait ainsi des données de son propre ministère publiées dans les annexes au budget.
Le tableau qu’on y dépeignait était moins rose. La moitié des routes du Québec sont en mauvais ou très mauvais état selon les évaluations du MTQ et cette proportion a récemment augmenté. Un portrait assez inquiétant lorsqu’on prend en compte tous les discours que nous avons entendus sur le rattrapage en cours dans l’entretien de nos infrastructures.
IMPRESSION MINISTÉRIELLE
Le ministre s’est même permis de contester les constats de son ministère. Assez loufoque et peu professionnelle, d’ailleurs, cette scène où le ministre en titre remet en cause des données de son ministère, mais à partir d’impressions générales. Pas de données complémentaires ou d’informations qui fourniraient un autre éclairage, à part un indice de confort de roulement.
Le ministre s’est contenté de dire que d’après lui, les routes sont en meilleur état que ne l’indique ce portrait. Et à l’appui de ces dires, le fait que nous ayons vu tant de cônes orange ces dernières années.
J’ai plus d’une fois applaudi la rigueur budgétaire du gouvernement libéral. Les finances du Québec sont en ordre. Le portrait est clair. D’ailleurs, nous commençons collectivement à en récolter des bénéfices tangibles. Bloomberg notait cette semaine que l’écart entre les taux sur emprunt du Québec et de l’ontario se trouve à parité. Nous avions payé des taux supérieurs à l’ontario depuis des décennies.
Comment se fait-il que nous ne puissions pas démontrer la même rigueur et le même sérieux dans la gestion des infrastructures routières? Un déficit chronique d’entretien des infrastructures constitue une forme cachée de dette. Tout comme la dette budgétaire, si nous faisons preuve de négligence aujourd’hui, nos enfants vont ramasser le fardeau demain.
PAS DE PORTRAIT CLAIR
Je m’explique mal que le même gouvernement qui aime répéter sur tous les toits que les finances du Québec sont en ordre accepte que le portrait des routes soit un tel fouillis. Après avoir vécu des effondrements de viaduc, après avoir annoncé des planifications de travaux d’infrastructures à coup de milliards, il est renversant que le Québec n’ait pas un portrait clair de l’état de ses routes et un plan aussi clair pour leur remise en état.
Plusieurs questions me paraissent fondamentales. Les travaux exécutés sont-ils faits avec les méthodes et matériaux de qualité qui assurent une durée de vie acceptable? Nous sommes nombreux à nous poser la question. Avonsnous aujourd’hui des investissements suffisants pour faire du rattrapage ou tentons-nous seulement de stopper la détérioration?
Si ces questions nous interpellent, je suis loin d’être certain que le ministère des Transports soit même en mesure d’y répondre. Loin d’être géré avec les mêmes critères de rigueur que nos finances, notre ministère des Transports donne parfois l’impression d’être encore comme la voirie d’autrefois. Des bouts de route au gré des humeurs et des promesses d’élection.