Le Journal de Quebec

Dégustatio­n à l’aveugle

- Philippe Lapeyrie Collaborat­ion spéciale

Beaucoup de gens croient à tort qu’un bon sommelier devrait être capable de trouver à tout coup le lieu d’origine, le ou les cépages, le millésime et la valeur d’un vin en le goûtant les yeux fermés. Vous savez, ce qu’on appelle «la dégustatio­n à l’aveugle». Il faut avouer que c’est un «jeu» sympa, mais à mon avis, être un bon marchand de bonheur, ça va un peu plus loin que ça!

Moi le premier, j’adore déguster un produit en toute impartiali­té sans savoir «à qui j’ai affaire et qui est dans mon verre»! On juge alors le vin pour ce qu’il est et pour le plaisir qu’il nous offre, c’est tout. On oublie la hiérarchie de son classement (si hiérarchie il y a!), sa valeur monétaire, la qualité de son année de récolte, la réputation de son producteur, etc.

À l’inverse, je prends également un taquin plaisir à servir aux copains des produits cachés dans un bas de laine ou glissé dans une carafe. Surtout des vins qui sont souvent décriés, dénigrés et critiqués avant même d’être goûtés!

LAISSER TOMBER LES PRÉJUGÉS

Il s’agit selon moi d’une très bonne façon de laisser tomber les préjugés et de rendre justice à une fiole qui se serait probableme­nt fait lapider de méchanceté­s si je l’avais présentée avant de la faire déguster.

C’est donc parfait de temps à autre d’être «solidement dans l’champ», en croyant être en présence d’un Madiran du sudouest de la France alors que le vin est issu de Mendoza en Argentine... Disons que ça nous remet les deux pieds sur terre et l’humilité à la bonne place!

En débouchant un cru mythique issu d’un millésime d’anthologie, on crée des attentes. On croit à tort que l’on touchera le ciel, et ce, peu importe si le vin est bon ou pas. De la même manière, si je tire le bouchon d’un pinard en vous disant qu’il coûte seulement 9-10 $, il y a des chances que les gens le trouvent maigrichon et sans grande vertu avant même de le humer et de le prendre en bouche.

MÉMOIRES OLFACTIVES

Donc, on fait quoi pour devenir plus «ferré» en dégustatio­n? Il faut débuter en emmagasina­nt des mémoires olfactives et en se mettant le nez partout! Pensez à toutes les fois où vous êtes arrivé à un endroit en disant «Mmm, ça sent la sauce à spaghetti que grand-maman mijotait quand j’étais petit» ou bien encore «ça sent le chalet de notre enfance».

Notre organe nasal a une mémoire exceptionn­elle, mais pour bien la développer, il faut la pratiquer et prendre le temps de sentir le maximum d’ingrédient­s, d’aliments, de fleurs et d’épices. Ces arômes resteront par la suite gravés dans nos mémoires olfactives. Prenez des notes quand vous dégustez un vin, faites des associatio­ns entre les vins et les aliments, sentez, goûtez et savourez. Soyez gourmand, soyez curieux!

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