Le Journal de Quebec

L’AUTRE SOLITUDE

En boudant ses joueurs, le Canadien tire dans le pied de la LHJMQ

- Jonathan Bernier Jbernierjd­m jonathan.bernier @quebecorme­dia.com

Seulement neuf Québécois ont trouvé preneur lors du dernier repêchage. Un nombre microscopi­que qui fait dire à plusieurs que le Canadien n’était pas dans le champ puisque la grande majorité des 31 formations ont, tout comme lui, levé le nez sur les joueurs développés dans la Belle Province. Et si on analysait ce résultat dans le sens inverse?

Se pourrait-il que ce soit l’attitude du Tricolore envers le produit local qui fasse hésiter les autres formations lorsque vient le temps de trancher entre quelques joueurs aux qualités similaires?

C’est le constat que les dépisteurs affectés à la couverture du hockey junior québécois ont fait au cours du week-end. Plusieurs d’entre eux en avaient long à dire au sujet de la façon dont le Canadien traite les patineurs québécois.

«Chaque fois qu’on essaie de vendre des joueurs du Québec à notre directeur du recrutemen­t, on se fait répondre qu’ils ne doivent pas être si bons que ça parce que même le Canadien n’en veut pas», a lancé un dépisteur d’une équipe de l’associatio­n de l’est ayant requis l’anonymat, en s’approchant du représenta­nt du Journal de Montréal.

POIDS INÉGAL

Visiblemen­t irrité, celui-ci a poursuivi en se montrant désolé pour ses deux homologues du Canadien en compagnie de qui il sillonne les différents arénas de la Ligue de hockey junior majeur du Québec.

«Serge Boisvert n’a aucun pouvoir et parfois, on se demande si Donald Audette n’a pas été engagé par politesse. Pourtant, ce sont deux gars très compétents», a-t-il pourfendu.

Une observatio­n qui a du sens. Au sein de l’équipe de 17 recruteurs amateurs du Canadien, incluant Trevor Timmins, quatre sont appelés à couvrir l’ouest canadien. Un quatuor auquel s’ajoute Shane Churla, directeur du recrutemen­t amateur, originaire de la Colombie-britanniqu­e.

C’est bien certain que ce territoire est beaucoup plus vaste à couvrir que celui du Québec et des Maritimes, mais lorsqu’on veut vendre un espoir, il faut aboyer fort pour pousser à deux contre cinq.

LE SYNDROME LOUIS LEBLANC

Surtout lorsqu’on travaille pour un vice-président aux opérations hockey (Timmins) échaudé par un choix qu’un directeur général lui avait entré de force dans la gorge il y a quelques années.

«Le Canadien souffre du syndrome Louis Leblanc. Il craint de prendre un Québécois sur qui il y a des attentes, a lancé un dépisteur à l’emploi d’une formation de l’ouest. Je peux comprendre dans les premières rondes, mais à partir du quatrième tour, où les chances de voir un espoir atteindre la LNH sont minces, il n’y a pas de raison d’avoir peur.»

Depuis 2010, un seul des 27 joueurs réclamés aussi loin a joué de façon régulière avec le Tricolore (Brendan Gallagher, 5e tour, 2010).

Olivier Archambaul­t (4e ronde, 2011), Charles Hudon (5e tour, 2012), Jeremy Grégoire (6e tour, 2013), Daniel Audette (5e tour, 2014) et Simon Bourque (6e tour, 2015) sont les seuls Québécois sur qui Timmins a tenté sa chance dans ces rondes tardives.

QUATRE ÉQUIPES DE TROP

Cela dit, il serait malhonnête de jeter le blâme uniquement sur le Canadien. Un employé d’une organisati­on de l’ouest a soutenu que la LHJMQ avait également ses torts.

Le circuit Courteau a beau compter 18 équipes, contre 20 pour la Ligue junior de l’ontario et 22 pour la Ligue junior de l’ouest, il considère tout de même que ses cadres sont trop larges et que cette réalité enlève beaucoup de crédibilit­é à ses joueurs.

«Dix-huit équipes, c’est quatre de trop pour le bassin de joueurs. Marquer

50 buts dans une ligue à 18 équipes, ça a pas mal moins de valeur que dans une ligue à 14. Avec 80 joueurs de moins, le produit serait beaucoup moins dilué», a-t-il indiqué.

Sans compter que la pyramide du hockey mineur peine à suffire à la demande.

«La Ligue midget AAA compte 15 équipes. C’est trop, mais en même temps il en manque trois pour fournir le niveau plus haut, a-t-il fait remarquer. Pour combler leurs besoins, les équipes de la LHJMQ sont obligées d’habiller un joueur de 16 ans qui n’est pas encore prêt ou un gars de 19 ans qui devrait jouer dans le junior AAA.»

Aussi bien s’y faire, car de ce côté, rien ne risque de changer.

 ??  ?? Jusqu’ici, une vingtaine de hockeyeurs du Québec ont reçu une invitation pour prendre part à un camp de la LNH. Le Canadien a fait appel à quatre d’entre eux: Alexandre Alain (Blainville-boisbriand), Maxime Fortier (Halifax), Alexandre Goulet...
Jusqu’ici, une vingtaine de hockeyeurs du Québec ont reçu une invitation pour prendre part à un camp de la LNH. Le Canadien a fait appel à quatre d’entre eux: Alexandre Alain (Blainville-boisbriand), Maxime Fortier (Halifax), Alexandre Goulet...

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