Une traversée mémorable
Un quart de siècle après la construction du Pélican, réplique du navire de l’explorateur d’iberville, Lise Pilote cherchait un moyen de souligner cet épisode marquant de La Malbaie. La venue des grands voiliers lui a fourni l’occasion rêvée.
Dans cette municipalité de Charlevoix, nombreux sont ceux qui se souviennent de la construction de ce majestueux bateau de bois, qui s’est déroulée de 1985 à 1991, face à l’église. Le Pélican était en fait le navire de guerre français de Pierre Le Moyne d’iberville qui, en 1697, triompha contre les Anglais dans la baie d’hudson.
La réplique de ce navire a plus tard été transformée en musée flottant, n’ayant jamais reçu les autorisations requises pour naviguer. Elle a quitté La Malbaie pour Montréal, puis pour La Louisiane, où elle a coulé sous les secousses de l’ouragan Katrina, pour être renflouée et coulée de nouveau après une collision avec un autre navire. Son souvenir est malgré tout impérissable dans la mémoire collective.
Lise Pilote, relationniste qui avait été impliquée dans le projet à l’époque, rêvait depuis des années de lui faire un clin d’oeil. Elle en avait informé le capitaine François Cordeau, architecte naval du Pélican de La Malbaie.
À Pâques cette année, celui-ci a pensé à Mme Pilote lorsqu’il a reçu le coup de fil d’un vieil ami américain, Ernest Cumming. Il avait construit avec lui La Grande Hermine pour Expo 67, et M. Cumming avait été capitaine du USCGC Eagle, voilier trois mâts et navire-école de la garde côtière américaine. Tous deux avaient projeté ensemble de construire la réplique du Pélican, projet qui se réalisera plusieurs années plus tard.
« Le capitaine Cumming souhaitait que M. Cordeau vienne à Québec voir le Eagle, qui ferait partie de la flotte des Grands Voiliers 2017, et sur lequel il avait reçu une partie de sa formation de capitaine, dans sa jeunesse, raconte Mme Pilote. Alors, M. Cordeau lui a dit : “Ce n’est pas moi qui devrais y aller, mais plutôt vous qui devriez venir avec le Eagle à La Malbaie”. »
TRAVERSÉE VERS QUÉBEC
De fil en aiguille, les portes se sont ouvertes et l’improbable s’est réalisé. Le capitaine actuel du Eagle, Matthew Meilstrup, a accepté de s’arrêter à La Malbaie. Construit en 1936, le Eagle a d’abord appartenu aux Allemands, qui l’avaient initialement baptisé Horst Wessel. Il servait alors aux nazis pour entraîner les cadets de la marine allemande, jusqu’à ce que les Américains s’en emparent comme prise de guerre, à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Son port d’attache se trouve au Connecticut, et on dit qu’il est le fruit de siècles de raffinement en matière de construction et de conception navales. De nombreuses personnalités politiques y sont montées au fil des ans, dont John F. Kennedy et Pierre Elliott Trudeau.
Lise Pilote a fait appel à tous ses contacts pour organiser deux jours de festivités afin de souligner cette visite extraordinaire, autre façon de rappeler le projet Pélican, mais aussi de marquer les liens tissés au fil des décennies entre les villégiateurs américains et La Malbaie.
« Tout le monde a fait du bénévolat et concentré ses effectifs sur cette fin de semaine-ci, et on a fait une réussite », s’est réjouie Mme Pilote. Plus de 3100 personnes ont visité le bateau dimanche et lundi. L’organisatrice a pris part à la traversée de La Malbaie vers Québec, hier, en compagnie de trois anciens collègues ayant participé à la construction du Pélican. Tous ont même pu grimper les cordages jusqu’à la vigie.
J’ai eu la chance de vivre aussi cette aventure, hier, et d’admirer à bord les paysages de Charlevoix, vus autrement et d’autant plus époustouflants. Une traversée mémorable qui nous a permis d’entrer dans le port de Québec au travers d’autres grands voiliers tout aussi majestueux. Le Eagle fera partie, jusqu’à dimanche, de la flotte d’une quarantaine de navires qui participe au Rendez-vous 2017.
Le Eagle, qui est arrivé hier à Québec, a attiré des milliers de personnes à La Malbaie depuis dimanche.