Le Journal de Quebec

Le doigt sur le bouton

- PIERRE MARTIN @Pmartin_udem

Alors que les États-unis et la Corée du Nord flirtent avec la confrontat­ion nucléaire, la crédibilit­é du président américain et la confiance qu’il inspire sont au plus bas.

L’escalade verbale entre le dictateur nord-coréen Kim Jong-un et le président américain met le monde sur les dents.

Donald Trump saura-t-il relever ce défi ? Alors que la décision d’utiliser l’arme nucléaire repose entièremen­t sur ses épaules, peuton faire confiance à un président au comporteme­nt si erratique ?

UN SEUL DÉCIDEUR

Dans plusieurs domaines, les frasques de Trump peuvent être prises avec un grain de sel, puisque le système politique américain comporte de multiples points de veto et le président peut rarement agir seul.

Ce n’est pas le cas en matière nucléaire. Après avoir assumé la lourde responsabi­lité d’utiliser l’arme en 1945, Harry Truman avait conclu que seul le président devrait pouvoir ordonner son usage. Cela semblait une bonne idée à l’époque.

À quelques reprises, notamment lors de la crise des missiles de Cuba, cette centralisa­tion de la décision a permis d’éviter un déclenchem­ent accidentel ou un scénario du genre « Docteur Folamour », où un général déjanté enclenche une catastroph­e inexorable.

Seul le président peut déclencher une confrontat­ion nucléaire et c’est pourquoi tous les yeux se tournent vers la Maison-blanche en période de crise.

IMPROVISAT­ION ET HYPERBOLE

C’est aussi pourquoi tous les présidents depuis Truman ont fait preuve d’une grande circonspec­tion et ont utilisé un langage mesuré lorsque des tensions internatio­nales rendaient possible le recours à l’arme nucléaire.

Dans ces moments de crise, la crédibilit­é d’un leader et la confiance qu’il peut inspirer sont des atouts essentiels.

Or, les réponses récentes de Donald Trump aux gestes et aux paroles du dictateur nord-coréen n’étaient ni circonspec­tes, ni mesurées, ni crédibles.

L’engagement de Trump de répondre à toute menace nord-coréenne par « la furie et le feu » et par un déploiemen­t de puissance sans précédent était manifestem­ent exagéré.

Trump est-il vraiment prêt à ordonner une frappe nucléaire en réponse à de simples menaces ? Est-il prêt à faire pleuvoir autant de bombes sur Pyongyang qu’il en est tombé sur le Vietnam ?

La menace est vite venue lorsque Kim Jong-un a évoqué une attaque possible contre le territoire américain de Guam. La furie et le feu n’ont pas suivi.

Le président se vante aussi d’avoir renforcé l’arsenal nucléaire américain, mais la modernisat­ion était déjà engagée et rien n’a changé en six mois.

CRÉDIBILIT­É ET CONFIANCE

Trump prétend parler un langage que les dictateurs comme Kim comprennen­t, mais ses déclaratio­ns fausses ou trompeuses minent sa crédibilit­é tant pour ses rivaux que pour ses partenaire­s.

Elles minent aussi l’appui de ses concitoyen­s, dont une majorité croissante ne lui fait pas confiance et ne croit pas qu’il saura surmonter la crise nord-coréenne.

Il n’y a pas nécessaire­ment de quoi courir immédiatem­ent aux abris, mais comme cette crise ne sera pas réglée de sitôt, on peut s’inquiéter de celui qui a le doigt sur le bouton.

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