Les patients sauront combien les pharmaciens empochent
Les factures devront dès vendredi inclure le coût du médicament et les honoraires
Les Québécois auront enfin une meilleure idée du prix des médicaments qu’ils achètent, car les pharmaciens seront obligés de l’écrire sur la facture avec les honoraires qu’ils chargent, dès vendredi.
« C’est un incitatif à rester raisonnable », se réjouit la présidente québécoise de l’association canadienne des compagnies d’assurances de personne, Lyne Duhaime.
Tout client d’une pharmacie verra dorénavant sur sa facture le prix du médicament, le prix du distributeur pour son transport et les honoraires du pharmacien, qui peuvent varier d’un endroit à l’autre.
Pour les patients qui souscrivent au régime public, remboursé par la RAMQ, ces honoraires par service rendu sont fixés par le gouvernement à environ 9 $. Mais, lorsque le régime d’assurance est privé, ces coûts restaient secrets.
Selon Mme Duhaime, dont l’organisme réclamait ce changement depuis de nombreuses années, les consommateurs pourront ainsi payer moins cher en magasinant les honoraires les moins élevés.
« La concurrence va s’opérer », croit le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, ajoutant que les compagnies d’assurance seront aussi en mesure de diriger leurs clients vers les pharmacies qui chargent moins cher.
DANS SON INTÉRÊT
« C’est dans l’intérêt du citoyen », dit-il à propos de la loi adoptée par son gouvernement. Selon lui, sans les factures actuelles « occultes » des pharmaciens, les prix des régimes d’assurance pourront aussi baisser.
Le professeur en pharmacie de l’université Laval, Marc Desgagnés, estime quant à lui que les écarts d’honoraires chargés entre le public et le privé peuvent varier de 50 % à 200 %.
Il fait partie du syndicat des professeurs de l’établissement, qui a étudié les coûts payés par ses membres.
« Les gens ne le réalisent pas et, au bout de la ligne, ce sont eux qui paient pour ça », dénonce-t-il, ajoutant que les prix faramineux mettent en péril les régimes privés, car les employeurs ne peuvent plus en absorber les coûts.
Le vice-président et directeur général de l’association québécoise des pharmaciens propriétaires (AQPP), Jean Bourcier, précise de son côté que les patients verront « les mêmes prix » d’une pharmacie à l’autre.
Pourtant, une étude du magazine Protégez-vous rapportait hier que l’écart de la marge de profit variait énormément d’une pharmacie à une autre.
M. Bourcier soutient que le prix au privé est plus élevé de 13 %, car il a suivi l’inflation, contrairement au taux imposé par la province.
Il déplore que les pharmaciens soient les seuls à devoir dévoiler leur marge de profit, ce que les assureurs, dit-il, n’ont pas à faire.
MÉLANGEANT
Le pharmacien Georges-étienne Gagnon, à Saint-jérôme, croit que la nouvelle facture mélangera les patients. Néanmoins, il y voit une occasion d’expliquer le travail des pharmaciens.
« Compter des pilules, ça me prend 15 secondes, mais ça me prend 15 minutes m’assurer qu’elles ne tueront pas le patient », donne-t-il en exemple.
Selon lui, les patients devront faire attention lorsque viendra le temps de comparer les honoraires, puisque certains médicaments demandent plus de recherches.