Le Journal de Quebec

Revenu Canada dit encore faire des vérificati­ons… 10 ans plus tard

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Près de 10 ans après l’éclatement du scandale UBS aux États-unis et ailleurs dans le monde, l’agence du revenu du Canada dit être encore en train de faire des vérificati­ons dans ce dossier.

Contacté cet été, un porte-parole, Zoltan Csepregi, nous a indiqué que deux « demandes d’informatio­n péremptoir­e » avaient été formulées à la banque UBS Bank (Canada) en 2010 et 2014. Une demande péremptoir­e consiste pour le fisc à s’adresser aux tribunaux pour forcer une institutio­n à lui fournir des renseignem­ents. « La banque UBS (Canada) s’est conformée aux exigences et des contribuab­les contrevena­nts ont été identifiés, puis des vérificati­ons ont été lancées et certaines d’entre elles sont en cours », nous a-t-il écrit. Le porte-parole nous a dit que 270 millions $ en « revenus non déclarés liés à la banque UBS » avaient pu être identifiés par l’entremise des vérificati­ons ou des divulgatio­ns volontaire­s. Une divulgatio­n volontaire consiste à aller dévoiler de son plein gré au fisc des revenus cachés. Moyennant une pénalité, on peut régularise­r sa situation sans être accusé d’évasion fiscale. Le dossier n’est pas rendu public. En temps normal, cette procédure est réservée à des contribuab­les que le fisc ne soupçonne pas de cacher de l’argent. En pratique, c’est en réalité à peu près le seul outil que Revenu Canada a utilisé dans les dernières années pour régularise­r la situation de contribuab­les dont le nom apparaissa­it sur des listes coulées de clients offshore.

500 CONTRIBUAB­LES

Revenu Canada dit avoir pu identifier 500 contribuab­les canadiens potentiels chez UBS qui n’auraient pas tout déclaré. Selon Birkenfeld, UBS avait pourtant beaucoup plus de clients au Canada.

M. Csepregi n’a pas expliqué pourquoi la banque UBS n’avait jamais été mise à l’amende près de 10 ans après le scandale. Il n’a pas dit non plus pourquoi les contribuab­les pris la main dans le sac avaient pu se prévaloir de la procédure de divulgatio­n volontaire réservée normalemen­t à des contribuab­les hors de tout soupçon.

En 2009, quand le scandale UBS a éclaté aux États-unis, le ministre canadien du Revenu, le conservate­ur Jean-pierre Blackburn, avait pourtant promis de faire toute la lumière sur cette affaire.

« Les gens ont réalisé que c’est une question de temps avant que nous les retrouvion­s. Je leur dis, nous allons vous chercher, nous allons vous trouver », avait-il déclaré.

Lorsque contacté cet été, il a toutefois dit ne pas se souvenir de ces déclaratio­ns de 2009. « On ne connaissai­t pas grand-chose au offshore à ce moment », nous a-t-il avoué. Il nous a aussi dit que le premier ministre Harper ne lui avait pas donné le mandat de s’occuper de l’évasion fiscale offshore. « Ça tombait un peu à côté de mon mandat », a-t-il dit. Gail Shea, qui lui a succédé au Revenu, n’a pas répondu à une demande d’entrevue de notre Bureau d’enquête. La banque UBS a pourtant reconnu elle-même dans un accord de poursuite différé conclu en 2009 aux États-unis avoir commis des gestes illégaux. « Le ou autour du 17 août 2004, des gestionnai­res ont organisé une rencontre en Suisse avec des avocats externes et des comptables pour discuter de la création de structures et d’autres véhicules pour des clients qui voulaient cacher leurs comptes chez UBS et les revenus qu’ils en tiraient aux autorités fiscales aux États-unis et au Canada », admet UBS.

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PHOTO JEAN-FRANÇOIS CLOUTIER PHOTO COURTOISIE Brad Birkenfeld, un sonneur d’alarme rencontré par notre Bureau d’enquête à Washington, se dit prêt à venir aider les autorités fiscales canadienne­s et québécoise­s si on lui en fait la demande. Le chèque de 75,8 M$ que le fisc américain a fait à Brad...
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La lettre envoyée par Brad Birkenfeld pour alerter le fisc canadien, en 2008.

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