UNE MERVEILLE ARCHITECTURALE
Dès son inauguration, le pont de Québec a fait jaser de lui à travers le monde. Cent ans plus tard, même si son image est ternie par la rouille, il demeure une merveille du génie canadien Le monument demeure aujourd’hui encore le plus long pont cantilever
Après les deux catastrophes majeures ayant marqué sa construction et qui ont fait 89 morts, le pont de Québec avait les yeux du monde rivés sur lui au moment de son ouverture, en 1917.
On s’arrachait les souvenirs de cette infrastructure magistrale au passé sombre. Certains tentaient de tirer profit de sa renommée. La compagnie Novelty Mfg. & Art voulait être la première à commercialiser l’image du pont. Si bien que sur la photo qui orne la carte postale publiée à l’époque, la travée centrale, qui n’était pas encore installée, avait été dessinée !
Dans le monde de l’ingénierie, au début du siècle dernier, cette construction faisait figure de prouesse technique.
Le 27 septembre 1917, la prestigieuse revue américaine Engineering NewsRecord saluait la « dette que les bâtisseurs de ponts ont contractée envers l’oeuvre accomplie à Québec » en raison des connaissances acquises sur la déformation du métal qui a mené au premier effondrement.
« Il a reçu toutes sortes d’éloges. Jusqu’en 1929, il était le pont avec la plus longue portée au monde, toutes catégories confondues. Il n’a été détrôné que par l’ambassador Bridge, entre Détroit et Windsor. Mais il s’agissait d’un pont suspendu. Il demeure encore à ce jour le plus long pont cantilever au monde », souligne le spécialiste du pont, Michel L’hébreux.
« ICÔNE DE L’INGÉNIERIE »
« C’était la première utilisation du système des poutres en K pour un pont de cette envergure. Il y a aussi eu l’utilisation d’un acier qui est en nickel. C’était une première et une innovation », note Lyne Fontaine, membre du comité international scientifique D’ICOMOS sur l’analyse et la restauration des structures du patrimoine architectural, qui qualifie le pont « d’icône de l’ingénierie ». ICOMOS est l’une des trois organisations consultatives auprès de L’UNESCO sur les questions de patrimoine mondial.
Dans sa reconnaissance comme Lieu historique national du Canada accordée en 1996, on souligne que le pont de Qué- bec est un « ouvrage d’art d’une extraordinaire prouesse, qui a été conçu et bâti en grande partie par des Canadiens ».
Une plaque commémorative installée à l’entrée nord rappelle aussi que la Société canadienne du génie civil et l’american Society for Civil Engineering l’ont désigné monument historique du génie civil international en 1987.
RARE TÉMOIN D’UNE ÉPOQUE RÉVOLUE
La technique du cantilever a été abandonnée quelque temps après la construction du pont, au profit de méthodes moins complexes et moins coûteuses. Ainsi, il demeure un rare témoin d’une époque révolue.
« Ce n’est pas seulement en 1917 que le pont de Québec a fait sa marque, indique Mme Fontaine. Mais c’est aussi sur toute une centaine d’années. On en parle encore aujourd’hui. »
Et pour Denis Beaulieu, ingénieur civil retraité spécialisé en structures d’acier, sa renommée dépasse les frontières du Québec et du Canada. « C’est un des ponts les plus connus du monde. »