Le Journal de Quebec

Le journal du cancer

- SOPHIE DUROCHER sophie.durocher @quebecorme­dia.com

Quand j’ai appris qu’anick Lemay avait le cancer, j’ai été estomaquée. Cette comédienne est si lumineuse, elle dégage un tel amour de la vie, une telle sensualité, que je n’arrivais pas à l’associer à la maladie, la souffrance.

Et puis j’ai commencé à lire les chroniques qu’elle publie sur le site Urbania et j’ai été bouleversé­e par son humour, sa lucidité, son humanité. Anick Lemay nous donne en direct, depuis un mois, une formidable leçon de courage et de résilience.

QUELLE PLUME !

Dans son premier texte, Le gouffre lumineux, paru le 9 avril, elle nous apprenait son diagnostic. « Je m’appelle Anick Lemay, j’ai 47 ans et j’ai le cancer du sein. » Dans son deuxième texte, publié le 19 avril, intitulé Mon manège à moi, elle relayait une terrible nouvelle : « Un autre cancer dans mon sein droit. Un cancer complèteme­nt différent des deux autres qui vivent dans le gauche ».

Et dans son troisième texte, Mon élastique, publié le 1er mai, elle raconte les lendemains de sa double mastectomi­e.

En trois petites semaines, son monde a été chaviré du tout au tout. Avec ces carnets, on suit presque en temps réel la progressio­n ravageuse de cette maladie. Anick Lemay ne s’apitoie pas sur son sort, mais elle nous raconte son cancer, son impact, son choc frontal, sans détour, sans dentelle, sans gants blancs. Âmes sensibles s’abstenir. Ça fesse dans le dash.

Ce qu’on découvre avec ces carnets, c’est qu’anick Lemay a une plume extraordin­aire. Elle a un talent fou, un style ravageur, qui va droit à l’essentiel. Dans d’autres circonstan­ces, on dirait qu’elle a un style chirurgica­l...

« J’ai soif. Terribleme­nt soif. Ma gorge brûle. J’ai comme une fourrure sur les dents et l’impression d’avoir avalé une plage de sable blanc… Méchante cuite. Je ne sais pas où je suis. » Dommage qu’il ait fallu qu’elle soit atteinte d’une maladie grave pour qu’on découvre chez elle ce talent caché.

Je vous disais qu’anick Lemay nous donne une leçon de courage. C’est aussi une leçon de vie. Elle raconte que face à la maladie, on fait le ménage dans notre vie. « Ceux qui t’aimaient mal ou à moitié, ceux pour qui tu t’obligeais à faire des courbettes, ceux que tu ne pouvais plus sentir, ils sont tous éjectés en même temps. C’est bien fait pareil, parce que quand tu entres dans la douleur, ceux qui restent sont attachés. À toi. Solidement. Les autres passent pas au casting… »

MERCI MADAME LEMAY

Anick Lemay, qui interprète Noémie dans L’échappée, se consacre à sa guérison. TVA a confirmé que l’on avait fait « des adaptation­s aux textes pour lui permettre de se reposer ».

La comédienne aurait pu choisir de vivre cet épisode douloureux en toute intimité, avec sa famille, ses amis. Mais je voulais la remercier d’avoir pris la plume pour nous raconter (à nous, son public, à qui elle ne doit rien, ni explicatio­n ni confidence), ses moments les plus poignants.

C’est comme si elle était dans un pays en guerre, le pays de la maladie, et qu’elle nous envoyait des lettres du front. Merci des nouvelles, Madame Lemay. Continuez à vous battre. On est derrière vous. Revenez-nous vite.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada