Si c’est gratuit, c’est vous le produit
Combien de questions avez-vous posées à Google cette semaine ? Combien de temps avez-vous passé sur Facebook ? Pas de panique, pas un sou ne vous sera facturé en échange. Mais Facebook et Google ont enregistré, classé, analysé et archivé chaque seconde. Grâce à toutes les données qu’ils ont réunies, ils peuvent vendre votre profil à l’annonceur le plus offrant.
« Si c’est gratuit, c’est que c’est vous le produit », prévient Kevin Ells, expert en sécurité pour la firme eblocker, une compagnie allemande qui commercialise un dispositif capable de rendre un internaute invisible sur internet. Le Journal l’a joint à son bureau de Californie.
Les quatre géants des données massives, Google, Facebook, Amazon et Apple, vivent tous de l’exploitation des données massives.
« C’est en quelque sorte en fournissant nos renseignements personnels à ces entreprises que nous les payons et que nous pouvons par conséquent avoir accès à leurs services », explique Option Consommateurs dans un mémoire déposé à la Chambre des communes.
L’organisme s’inquiète de l’influence grandissante du big data dans nos vies. « Les Canadiens comprennent en géné- ral assez mal comment tout cela fonctionne et quel impact ces renseignements peuvent avoir », écrit-il.
C’est l’exploitation des données qui permet qu’un internaute qui fait une recherche de voyage sur Google soit ensuite soumis à des publicités pour des billets d’avion sur Facebook, ou pour des valises sur le site d’un magazine.
EMPREINTE DIGITALE
M. Ells compare les données que nous dispersons sur internet à nos empreintes digitales et il souligne qu’elles ne sont pas uniquement dans les serveurs de Facebook, Google, Amazon et Apple.
eblocker a calculé que les sites web contiennent en moyenne une vingtaine d’espions et parfois même jusqu’à plus de soixante-dix. Il peut s’agir de cookies ou de pixels qui cachent un code et permettent de reconnaître l’internaute et de le suivre d’un site à l’autre.
De plus, à travers les applications, nous livrons des données génétiques, des images, des données de géolocalisation, l’expression d’émotions, des données métaboliques, la nature de nos relations avec autrui, nos opinions, etc.
L’association canadienne du marketing indique que recueillir des données personnelles est devenu essentiel à la réussite et à la compétitivité des entreprises.
« Les consommateurs s’attendent à ce que les organisations fournissent des services personnalisés », insiste-t-elle, également dans un mémoire déposé à la Chambre des communes.
PROFILAGE
Mais, le profilage en ligne va bien au-delà du marketing, prévient M. Ells. Ils indiquent que les prix des produits en ligne diffèrent en fonction du profil de chaque internaute.
« Selon votre localisation et le type d’appareil que vous utilisez, un prix différent vous est offert. Nous avons vu ce type de discrimination sur toute sorte de produits, même sur de la nourriture », explique-t-il.
Et ce n’est pas tout : « En établissant votre profil, les entreprises peuvent aussi filtrer les contenus que vous voyez sur les réseaux sociaux ou sur les sites d’information. Elles peuvent aussi vendre ces données à des tierces parties, comme des compagnies d’assurances ou à des banques », ajoute l’expert.
Pour Option Consommateurs, cela soulève clairement « un risque d’exclusion socio-économique ».