MATHIEU BOCK-CÔTÉ Notre grande aventure
Demain, on célébrera la Saint-Jean, ou si on préfère, la fête nationale.
HISTOIRE
Le peuple québécois en profite alors pour se rappeler qu’il est de langue et de culture françaises. Il se rappelle même fièrement son histoire, une fascinante aventure qui l’a mené de la Nouvelle-france au Québec moderne.
Et il y a de vrais motifs de fierté. Que nous existions encore comme peuple est le plus important, alors que l’histoire aurait pu nous broyer et nous condamner à devenir un résidu folklorique attendrissant, mais insignifiant, comme les Cajuns en Louisiane.
Nous sommes même passés à deux doigts de faire l’indépendance. Nous pourrions la faire demain matin, si nous le voulions. Nous en avons les moyens. Mais nous n’avons plus la tête à ça, comme si notre existence nous lassait. Ce ne serait pourtant pas si mal, un pays français en Amérique du Nord.
La culture québécoise exprime son génie par la chanson et demain, à la radio, on entendra des classiques du temps des grands, comme Vigneault, Leclerc, Charlebois, Séguin, Piché, Rivard et compagnie. Mais n’en prenons pas l’habitude : le lendemain, on retournera aux platitudes commerciales anglophones habituelles.
Notre peuple est en carence de fierté depuis un bon moment déjà. Auparavant, il cherchait à exprimer sa différence. Maintenant, il a la tentation de l’estomper, comme s’il la traînait comme un fardeau à l’heure de la mondialisation.
C’est peut-être pour cela qu’un artiste comme Hubert Lenoir se désole qu’à la Saint-jean, on ne chante pas aussi en anglais. Il faut lui répondre que le reste de l’année appartient déjà à l’anglais et que lors de notre fête nationale, nous sommes en droit de célébrer ce que nous avons en propre.
Que célébrerons-nous demain ? Notre admirable résistance comme peuple en Amérique. Notre entêtement à ne pas disparaître. Un jour, nous ajouterons à la Saint-jean la fête de l’indépendance.