Un long voyage se conclut en drame
La famille du garçon de 6 ans qui s’est noyé à Montréal lundi était arrivée au Canada depuis à peine trois mois
Le rêve canadien d’une famille de migrants nigérians arrivée au Québec en avril s’est transformé en cauchemar lundi. Deux jours après être emménagé dans son premier logement à Montréal, le fils aîné de 6 ans s’est noyé dans une piscine du quartier Saint-léonard.
« JE LUI AVAIS DIT DE RESTER À CÔTÉ DE MOI. MAIS ÇA A PRIS UNE SECONDE D’INATTENTION ET JE L’AVAIS PERDU. » – Bukola Babayemi, mère de Bukumi
« Je rêve de pouvoir revenir en arrière », sanglote Bukola Babayemi, 31 ans, dans son appartement presque vide où elle venait tout juste d’emménager.
En se rendant à la piscine du complexe à loyer modique lundi, lorsque la température battait des records de chaleur, elle était loin de se douter qu’elle passait ses derniers instants avec son fils aîné, Bukumi.
« Je lui avais dit de rester à côté de moi. Mais ça a pris une seconde d’inattention et je l’avais perdu. J’ai tout de suite alerté la sauveteuse, mais c’était trop tard », murmure la mère en pleurs.
Après avoir été retrouvé inconscient dans le fond de la piscine, le petit garçon a été transporté à l’hôpital, où son décès a été constaté.
UNE VIE MEILLEURE
Bukumi devait commencer l’école en septembre. Dans les bras de Bukola Babayemi, sa fille de 10 mois, Demilade, s’amuse, inconsciente du drame qui vient de se dérouler. Son autre fils, Jomiloju, 3 ans, court dans tous les sens dans l’appartement de trois pièces où on trouve comme seuls meubles trois tabourets, un matelas, et une chaise berçante pour enfant.
C’est dans l’espoir d’offrir une vie meilleure pour ses enfants que Mme Babayemi a entrepris le grand voyage pour venir au Canada depuis Houston, en avril dernier, comme environ 6300 migrants l’ont fait depuis le début de l’année.
Arrivée aux États-unis en août 2016, elle dit s’être vite rendu compte que ce pays n’était pas fait pour sa famille.
« C’est si dur pour les migrants là-bas. On ne peut presque rien faire, je devais quémander à l’église pour de la nourriture pour mes enfants », raconte-t-elle.
MILLIERS DE KILOMÈTRES
Grâce à son église et aux petits boulots qu’elle avait réussi à décrocher çà et là pour laver des planchers ou encore garder d’autres enfants, elle a réussi à mettre de côté les quelques milliers de dollars pour faire le voyage vers le Canada.
En avion jusqu’à Plattsburgh, puis en autobus jusqu’à la frontière, elle raconte avoir parcouru plusieurs milliers de kilomètres pour venir s’établir à Montréal.
En louant son premier appartement au pays, sur la rue d’avila, dans le quartier Saint-léonard, grâce à ses chèques d’aide sociale, elle avait finalement trouvé sa maison.
« Je n’ai jamais été aussi bien accueillie, l’hospitalité des gens est remarquable ici », dit celle qui vient tout juste de passer deux mois dans un refuge à Montréal.
« Maintenant je ne sais pas ce que je vais faire », avoue Mme Babayemi, qui n’a plus de nouvelles de son mari, parti trouver un emploi à New York alors que la famille se démenait pour joindre les deux bouts à Houston.
Elle craint maintenant de ne pas pouvoir trouver d’emploi, elle qui a déjà deux enfants en bas âge à sa charge.
« On a besoin de tout, apportez-en des meubles », lance sa soeur adoptive, Oluwaseyi Gaggophien.