Un brillant rival britannique pour Tesla
Le moins qu’on puisse dire est que Jaguar n’aime pas les demimesures. Cette noble marque n’a effectivement jamais produit, jusqu’à maintenant, le moindre modèle écolo, contrairement à la quasi-totalité de ses rivales dans le monde du luxe. Aucun hybride timide et encore moins rechargeable.
Et que choisit de créer cette bande de Britanniques comme première tentative ? Un multisegment racé, 100 % électrique et à rouage intégral. Baptisé I-pace, il s’agit d’un véhicule de luxe et de performance qui devient le premier rival des Tesla Model X et S qui font les manchettes depuis sept ans. Rien de moins.
Mieux encore, en livrant les premiers exemplaires de son I-pace, fin août, Jaguar devancera tous les constructeurs allemands qui sont encore à préparer leurs propres répliques à Tesla. Pas mal, quand même, pour une marque longtemps associée uniquement à des sièges en cuir épais, des boiseries luisantes et un roulement confortable.
PUISSANCE INTÉGRALE
À chacun des essieux de l’i-pace, on trouve un moteur électrique très compact, conçu à l’interne par un jeune ingénieur et touché par des dizaines de brevets. Ce qui lui vaut également une répartition parfaite de son poids, vertu toujours précieuse pour le comportement, la stabilité et le plaisir de conduire.
Ces deux moteurs fournissent 394 chevaux et 512 livres-pieds de couple instantané aux quatre roues, et la tenue de route est rehaussée avec des transferts de couple par application sélective des freins. Jaguar promet un 0-100 km/h en 4,8 secondes et l’i-pace fait peut-être mieux, puisque j’ai atteint 205 km/h sur la ligne droite du circuit de l’algarve, au Portugal, alors que la vitesse de pointe annoncée est de 200 km/h.
L’i-pace se débrouille très bien sur circuit où il est stable et solide, en virage comme en freinage intense. C’est cependant sur la route qu’il est le plus impressionnant. Il se montre d’une agilité étonnante et d’un aplomb sans reproche sur un ruban étroit et tortueux pour filer ensuite comme une flèche sur l’autoroute, dans un silence quasi parfait.
Même scénario sur un sentier qu’il escalade sans peine, à flanc de montagne, après un passage à gué où il a profité des centimètres additionnels de garde au sol que lui procurent les ressorts pneumatiques. En conduite, on ne peut franchement lui reprocher qu’une direction précise, mais peu tactile et un diamètre de braquage un peu long.
SOLIDE, SPACIEUX ET AÉRODYNAMIQUE
La structure autoporteuse de l’i-pace et sa carrosserie sont faites en aluminium collé et riveté à 94 %. Jaguar affirme que l’i-pace a la coque la plus rigide de sa gamme. On le croit sans peine dès les premières minutes, tellement il est solide, imperturbable, doux et silencieux.
Débarrassés de la masse encombrante d’un moteur thermique, les stylistes et designers lui ont sculpté une silhouette merveilleusement élégante et aérodynamique. Sa partie avant très courte et un empattement plus long que celui de l’utilitaire sport F-pace ont permis de lui tailler un habitacle très avancé.
La partie arrière haute et tronquée favorise l’efficacité aérodynamique et libère 656 litres de volume cargo sous le hayon, avec les dossiers arrière en place. Le chiffre passe à 1453 litres quand on les replie. Malgré tout, l’i-pace est légèrement plus court que le F-pace, grâce à des porteà-faux extrêmement courts qui profitent aussi à l’agilité et la stabilité.
L’empattement long permet aussi de poser la batterie de propulsion au lithiumion sous le plancher, comme dans les Tesla, ce qui abaisse nettement le centre de gravité. Ses 432 cellules recèlent 90 kwh d’énergie. Assez pour une autonomie de 386 km. On peut récupérer 80 % de cette charge en 40 minutes, avec une borne rapide de 100 kw. Une recharge complète exige par contre 12,9 heures, avec une borne de niveau 2 à 240 volts et 7 kw.
CLASSIQUE ET ULTRAMODERNE
À bord, les sièges avant sont d’un confort et d’un maintien impeccables, la position de conduite très juste et les contrôles très naturels. Parce que Jaguar croit encore aux qualités ergonomiques et au plaisir tout simple de manipuler boutons, leviers,
molettes et autres commutateurs.
L’i-pace offre néanmoins les deux grands écrans tactiles ultramodernes d’abord découverts dans le Range Rover Velar et un écran horizontal configurable pour le conducteur. On apprivoise assez vite la majorité des réglages, mais certains sont franchement introuvables au premier abord, avec la kyrielle de fonctions et de systèmes intégrés. Le système est parfois lent à réagir, en plus.
L’intelligence artificielle vient également s’en mêler et l’i-pace deviendra le premier véhicule Jaguar à profiter de mises à jour sans fil de ses systèmes et composantes électroniques, encore une fois comme les Tesla. On peut difficilement être plus de son temps.
Je serais parfaitement heureux au volant d’un I-pace S, dont le prix de base est de 86 500 $, même si Jaguar Canada s’attend à vendre surtout les SE et HSE. Les performances et l’autonomie sont les mêmes et le comportement, sur roues de 20 pouces, identique à celui du LE (ou Première édition) « rouge photon » conduit en premier lors du lancement, sur de grandes roues de 22 pouces.
Il est d’ailleurs intéressant de noter que ce même LE, installé au sommet de la gamme I-pace actuelle, à un prix de 103 500 $, est moins cher qu’un Tesla Model X, un peu moins puissant que lui, par une marge quand même substantielle de 80 000 $.
Chose certaine, ce multisegment électrique agile, solide, puissant et raffiné est une réussite spectaculaire, développée en temps record. Un véritable exploit pour Jaguar.