Le Journal de Quebec

SON BÉBÉ A 50 ANS

Léandre Normand est le père du Tour de l’abitibi

- Alain Bergeron l Abergeronj­dq bergeron @quebecorme­dia.com

VAL-D’OR | Ç’a débuté par un coup de foudre pour la course cycliste, puis son sens inné pour l’organisati­on et l’attachemen­t viscéral à sa région ont fait le reste. Plus que jamais ces jours-ci, Léandre Normand assume fièrement la paternité du Tour de l’abitibi, qui fête ses 50 ans.

Cette édition historique, du 16 au 22 juillet, déborde du sport. Seule destinatio­n hors d’europe et d’asie au calendrier de la Coupe des nations de l’union cycliste internatio­nale, cette course par étapes pour juniors qui arrive à son demi-siècle évoque aussi la mobilisati­on et l’acharnemen­t d’une région à peine centenaire.

Lancé en 1969, le Tour côtoie, grâce à sa longévité, la Classique de canots de la Mauricie (1934), la Traversée du lac Saint-jean (1955) et le Tournoi de hockey pee-wee de Québec (1960) dans la liste sélecte d’événements sportifs à portée internatio­nale.

« Ce qui me rend le plus fier, c’est qu’il soit encore là 50 ans plus tard. Pour moi, c’est plus ça que l’aspect internatio­nal qu’il a acquis », donne à entendre Léandre Normand.

PASSION SOUDAINE

Pourtant, rien dans le relief ne prédisposa­it cette plaine à devenir l’épicentre mondial du cyclisme junior. Dans un sport qui se délecte des souffrance­s dans des cols et autres montées à 14 %, il n’y a rien de tel au 48e parallèle nord. Qu’une planche à repasser, sinon quelques buttons.

Peu importe, le jeune journalist­e de l’écho abitibien basé à Amos, qui cognait à la porte de la vingtaine en 1965, n’allait plus brimer sa passion instantané­e pour le vélo après avoir assisté à sa première course.

« C’était la première fois de ma vie que je voyais un bicycle à 10 vitesses », se souvient le natif de Palmarolle qui a eu parmi ses copains d’école l’ex-gardien de la Ligue nationale Rogatien Vachon.

Au milieu des années soixante, Normand a pratiqué dans son Abitibi, le journalism­e à la française, en engageant son journal dans l’organisati­on de diverses courses, un peu à l’image du Tour de France, du Critérium du Dauphinéet­d’autresmonu­mentsducyc­lisme européen. Il assistait à d’autres courses ailleurs au Québec, dévorait les magazines français du vélo et « capotait » sur les carrières de Jacques Anquetil, Raymond Poulidor et autres étoiles sur deux roues de l’époque.

UN MÉRITE À PARTAGER

Après une course préparatoi­re en 1968 – la Cyclo-nordo –, le journalist­e-organisate­ur était mûr pour un plus grand projet. Le Québec comptait sur d’importante­s courses pour la catégorie senior, dont le Tour du Saint-laurent, alors « on devait être différent », explique Normand.

Ce sera donc une course pour des cyclistes de 17 et 18 ans. Ce « Tour de France des juniors », comme on l’identifie parfois dans les milieux cyclistes, n’était pas une idée banale, à bien y penser.

« J’essaie de ne pas trop m’y arrêter, affirme humblement le fondateur. Soyons honnête, le Tour, je ne l’ai pas organisé dans ses années les plus glorieuses. Peutêtre qu’il a toujours été bien structuré parce que j’insistais moi aussi sur la qualité des services, mais l’internatio­nalisation du Tour, je ne peux pas me l’approprier. Ce n’est pas moi. Le Tour est devenu gros, mais je n’étais déjà plus là. Je dois partager le mérite de ce qu’est devenu le Tour. »

COMME UN FILS

Léandre Normand revisitera son oeuvre durant cette 50e édition. S’il peut, il s’en fait un devoir chaque année depuis qu’il s’est établi à Montréal en 1978. Ce Tour l’habite. D’accord pour en reconnaîtr­e la paternité, il se refuse toutefois à se décrire comme un précurseur dans ce sport, encore moins comme un personnage qui aura marqué à sa façon l’abitibi.

« Absolument pas. Est-ce que les gens se souviennen­t d’hector Authier? », demandet-il, en référence à cet avocat, politicien et journalist­e considéré comme le père de l’abitibi.

« On fait notre temps, on passe, puis il y a autre chose. C’est comme ça, la vie », dit-il simplement.

Dans l’un des 10 livres qu’il a pondus – De la main gauche, paru en 2011 –, Léandre Normand nous révèle en quelques lignes le symbole fort qu’exerce le Tour sur lui : « [...] il demeurera ce fils de chair que je n’ai jamais eu. »

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