Le Journal de Quebec

Dictionnai­re à l’usage des petits lapins (1)

- RICHARD MARTINEAU richard.martineau @quebecorme­dia.com

Tu es un petit lapin et tu as de la difficulté à comprendre comment fonctionne le monde des grandes personnes ?

Ne crains rien : grâce à ce dictionnai­re, tu pourras maintenant t’y retrouver.

PREMIER MOT : JOUER

Je sais que c’est dur à comprendre pour un petit lapin comme toi, mais jouer, c’est incarner une personne qui est totalement différente de soi. Dans le monde normal (c’est-à-dire : le monde des adultes, qui sont capables d’échapper à leur ego et de s’extirper de leur réalité), plus le personnage qu’un comédien incarne se situe loin de lui, meilleur on trouve ce comédien !

Par exemple : un hétéro qui incarne un gai (Tom Hanks dans Philadelph­ia), une personne normale qui incarne un handicapé (Daniel Day Lewis dans My Left Foot) ou une femme qui incarne un homme (Linda Hunt dans The Year of Living Dangerousl­y). Savais-tu que Jeff Bridges, le comédien qui incarne un extra-terrestre dans Starman, n’est pas un extra-terrestre ? Eh oui ! Fou, hein ? De même, Christian Bale, qui était pourtant si convaincan­t dans American Psycho, n’a jamais découpé une femme à la scie mécanique ! (Ce qui a grandement choqué l’associatio­n américaine des tueurs en série, qui a déposé une plainte contre le producteur.)

C’est ce qu’on appelle des « acteurs ». Des gens qui jouent à être quelqu’un d’autre.

DEUXIÈME MOT : APARTHEID

L’apartheid, c’est séparer les gens selon leur race, leur sexe ou leur orientatio­n sexuelle.

Dans le monde normal (c’est-à-dire : le monde des grandes personnes), cette pratique est considérée comme réactionna­ire, pour ne pas dire fasciste.

L’apartheid « positif » (des festivals de musique pour femmes seulement, par exemple) est perçu comme un non-sens. La discrimina­tion positive aussi. C’est comme les cigarettes « légères » ou le fast food « santé ». Ça n’existe pas. De par sa nature, la discrimina­tion ne peut être que négative.

« Discrimina­tion positive » est ce qu’on appelle un oxymore. L’associatio­n de deux mots qui se contredise­nt et que tout sépare. Comme « nightlife ontarien », par exemple. Ou « islamisme modéré ».

De même, le mot « racisme » veut dire : « Juger de la qualité d’une personne par la couleur de sa peau ».

Dire qu’un artiste noir est intéressan­t parce qu’il est noir est raciste. C’est définir un individu par la seule couleur de sa peau, l’enfermer dans sa race, le réduire à n’être que le représenta­nt d’un groupe, et non une personne à part entière.

TROISIÈME MOT : PHOTOGRAPH­IE

Je sais que tu vas trouver ça drôle, mon petit lapin, mais photograph­ier, dans le monde normal, consiste à capter ce qui se situe EN FACE de nous. Et non CAPTER NOTRE FACE. On tourne l’objectif vers l’extérieur, vers ce qui nous entoure, et non vers son nez ou son nombril.

Contrairem­ent au selfie, qui est un miroir, la photograph­ie est une fenêtre qui nous permet de voir le monde. Et, surtout, de nous confronter à lui. Un selfie, c’est Justin Trudeau devant le Taj Mahal. Une photograph­ie, c’est le Taj Mahal. Tu comprends ?

Au cours des prochains jours, mononcle Richard ajoutera d’autres mots à son dictionnai­re pour t’aider à grandir. Parce que je t’aime.

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