Le Journal de Quebec

La facture pourrait être salée pour la Ville de Lévis

Des plaintes de harcèlemen­t psychologi­que contre le maire en cause

- JEAN-LUC LAVALLÉE

Si Gilles Lehouillie­r devait être reconnu coupable de harcèlemen­t psychologi­que par le Tribunal administra­tif du travail (TAT), la facture pourrait être très salée pour la Ville de Lévis, selon un spécialist­e en droit du travail.

Outre les honoraires d’avocats, la Loi sur les normes du travail prévoit un éventail de sanctions pour tout employeur fautif. Le TAT a le pouvoir d’ordonner la réintégrat­ion d’un salarié, mais il peut aussi obliger l’employeur à verser des indemnités pour le « salaire perdu », et même des dommages punitifs et moraux.

« Même si les employés ont quitté eux-mêmes le service, ils peuvent être indemnisés. Je pense que la Ville de Lévis pourrait être condamnée à payer des sommes très significat­ives », estime Alain Barré, professeur au Départemen­t des relations industriel­les de l’université Laval.

« La Ville de Lévis savait depuis belle lurette ce qui se passait avec le personnel politique du maire Lehouillie­r. Est-ce qu’elle a pris les moyens pour faire cesser la conduite répréhensi­ble ? La réponse est clairement “non” », ajoute le spécialist­e.

Rappelons que 11 sources ont confié au Journal avoir été victimes ou témoins de comporteme­nts déplacés, de gestes violents et de colères répétitive­s de l’élu au fil des ans. Trois présumées victimes de harcèlemen­t ont officielle­ment porté plainte à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST).

LES SANCTIONS SONT RARES

« La majorité des plaintes de harcèlemen­t psychologi­que ne donne toutefois pas de résultats. Il y a très peu de risques de conséquenc­es, sinon à la réputation », relativise Danielle Pilette, spécialist­e en gestion municipale à L’UQAM. Entre 2004 et 2014, moins de 7 % des quelque 24 000 plaintes logées au Québec ont abouti au tribunal. La majorité d’entre elles se sont ensuite soldées par une entente à l’amiable.

Et les sanctions, lorsqu’il y en a, manquent de mordant selon le professeur Angelo Soares à L’UQAM, un des membres fondateurs de l’associatio­n internatio­nale sur le harcèlemen­t psychologi­que au travail.

« Je crois qu’il y a un cas où il y a eu 70 000 $ qui ont dû être versés à la personne. C’est une des plus élevées. Il y a beaucoup de décisions à 500 $. C’est insultant pour tout le monde et pour la personne qui vit du harcèlemen­t parce qu’on ne peut pas chiffrer la souffrance qu’elle vit, les conséquenc­es pour sa famille, sa carrière et sa santé. »

Alain Barré rappelle toutefois que la jurisprude­nce évolue et que cette affaire pourrait représente­r une occasion pour le TAT de « donner un coup de barre », si les plaintes sont jugées recevables au terme de leur examen.

 ?? PHOTO D’ARCHIVES, JEAN-FRANÇOIS DESGAGNÉS ?? Appuyé par tous ses collègues du conseil municipal, le maire de Lévis Gilles Lehouillie­r a nié en bloc, jeudi, les allégation­s de harcèlemen­t psychologi­que qui le visent, se disant victime d’un « coup monté ». Sur la photo, l’élu à l’hôtel de ville de Lévis, en mars dernier.
PHOTO D’ARCHIVES, JEAN-FRANÇOIS DESGAGNÉS Appuyé par tous ses collègues du conseil municipal, le maire de Lévis Gilles Lehouillie­r a nié en bloc, jeudi, les allégation­s de harcèlemen­t psychologi­que qui le visent, se disant victime d’un « coup monté ». Sur la photo, l’élu à l’hôtel de ville de Lévis, en mars dernier.

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