Le Journal de Quebec

Pris à la gorge par leurs assureurs

Des dizaines de camionneur­s québécois ont vu leurs assurances doubler dans les derniers mois

- MAGALIE LAPOINTE

Depuis le printemps, certaines primes d’assurances pour les camionneur­s ont plus que doublé, ce qui pourrait forcer certains à abandonner leur métier.

Michel Arnel, 55 ans, a fait le saut le 8 septembre lorsque son courtier d’assurance lui a dit que sa prime pour la prochaine année serait de 32 000 $. Il avait payé 11 800 $ l’an dernier. Il s’agit d’une hausse de 171 % pour avoir exactement la même protection sur son vieux camion 2007 évalué à 25 000 $.

L’homme conduit depuis 28 ans et a un excellent dossier de conduite. Il dit n’avoir jamais réclamé à ses assurances.

« C’est excessif. Je n’ai pas changé d’équipement. J’ai un vieux camion. Heureuseme­nt, j’ai l’avantage de ne pas avoir de prêt sur mon camion. Mais quelqu’un dans ma situation qui doit encore faire des paiements, ce serait différent », dit le camionneur.

Le cas de M. Arnel n’est pas unique. Des dizaines de propriétai­res de camions qui voyagent aux États-unis ou dans le reste du Canada subissent des hausses importante­s de leurs primes d’assurances.

À CAUSE DES POURSUITES

Un associé des courtiers d’assurance EGR inc., Louis Bélanger, affirme n’avoir jamais vécu une telle crise dans le camionnage, lui qui est dans le domaine depuis 1978.

Plusieurs compagnies d’assurance ne veulent plus assurer les camionneur­s en raison des nombreuses poursuites civiles intentées contre eux aux États-unis ou en Ontario après des accidents.

Au Québec, de telles poursuites sont impossible­s en raison du principe du « no fault » mis en place en 1978 par Lise Payette.

Il y a une dizaine d’années, une quinzaine d’entreprise­s pouvaient assurer des camionneur­s. Il n’en reste plus que trois.

« Si ça continue, c’est le consommate­ur qui va un jour en payer le prix », a expliqué M. Bélanger.

Les grandes compagnies de camionnage ne sont pas épargnées par la hausse, mais dans une moindre mesure.

Par exemple, Transport Bourassa, une compagnie québécoise qui réalise 50 % de ses transports aux États-unis et qui possède 200 camions, devra payer 56 % plus cher sa prime d’assurance.

La directrice de la flotte, Marilyn Bourassa, estime que malgré le très bon dossier de la compagnie, cette hausse était inévitable en raison de la faible concurrenc­e chez les assureurs.

Le Groupe Laberge, qui possède une cinquantai­ne de camions, a de son côté vu sa prime augmenter de 16 %. C’est une hausse environ huit fois plus grande que dans les années précédente­s.

ON FERME LA SHOP ?

Le camionneur Jean-françois Ouellet est président de Rabais routier, une associatio­n qui négocie pour que ses 780 entreprise­s membres aient de meilleurs prix. Depuis quelques mois, lui et sa conjointe, Linda Gazaille, ne cessent de recevoir des appels de camionneur­s qui veulent lâcher ou qui ne voient pas comment ils feront pour arriver avec une telle prime d’assurance.

 ?? PHOTO COURTOISIE ?? Jean-françois Ouellet et Linda Gazaille, propriétai­res de la compagnie Transport Blue Rider, craignent la hausse de leur prime d’assurance puisqu’ils doivent souvent traverser les frontières québécoise­s, où ils risquent de juteuses poursuites.
PHOTO COURTOISIE Jean-françois Ouellet et Linda Gazaille, propriétai­res de la compagnie Transport Blue Rider, craignent la hausse de leur prime d’assurance puisqu’ils doivent souvent traverser les frontières québécoise­s, où ils risquent de juteuses poursuites.

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