Paul Desmarais ciblé dans un livre
L’auteur à l’origine de l’affaire Clearstream dépeint le défunt milliardaire comme un prédateur financier
Un livre d’enquête qui vient de paraître en France accuse Paul Desmarais, mort en 2013, et son partenaire d’affaires belge Albert Frère de s’être enrichis au détriment des États.
« On est au coeur de ce qui fonde le capitalisme financier. Les milliardaires et les stars de l’investissement privé poursuivent deux buts qui participent à leur enrichissement : échapper à la fiscalité et bénéficier, partout où c’est possible, et sans que ça en ait l’air, de l’argent public. Albert Frère et Paul Desmarais sont des orfèvres en la matière. Ils savent flairer la bonne affaire. Pour la réussir, ils ont besoin d’appuis dans l’appareil d’état », écrivent Catherine Le Gall et Denis Robert dans Les Prédateurs, publié aux éditions du Cherche Midi.
M. Robert est une pointure en journalisme d’enquête : il a mis au jour le scandale Clearstream, cette firme du Luxembourg qui aurait servi de plateforme d’évasion fiscale et de blanchiment d’argent.
Les auteurs s’appuient sur quatre affaires, mais Paul Desmarais n’est directement touché que par celle du géant énergétique GDF Suez, renommé Engie en 2015.
LE COUP DE LA BANQUE PARIBAS
Le livre rappelle que MM. Desmarais et Frère se sont rapprochés à la fin des années 1970 alors qu’ils siégeaient au conseil d’administration de la banque française Paribas. En 1981, ils prendront le contrôle de la filiale suisse de Paribas afin de la soustraire de la nationalisation décrétée par le gouvernement Mitterrand.
Baptisée « Arche de Noé », l’opération est menée par le biais de la société suisse Pargesa, que contrôlent Power Corporation et le groupe Frère par l’entremise d’une firme néerlandaise, Parjointco. Pargesa détient aujourd’hui des intérêts dans des géants européens comme Total, Lafargeholcim, Pernod Ricard et Adidas.
Le livre revient sur l’amitié entre Paul Desmarais et Nicolas Sarkozy. En 1995, M. Desmarais reçoit M. Sarkozy à son domaine de Sagard, dans Charlevoix, alors que le futur président traverse une mauvaise passe. Nicolas Sarkozy ne l’oubliera jamais : il remettra la Légion d’honneur à Paul Desmarais et à sa femme Jacqueline.
Les auteurs se butent toutefois à la complexité des astucieuses transactions qu’ils tentent d’élucider. Ils reconnaissent que la justice n’a rien trouvé à redire.
Mais ils n’en démordent pas : pour eux, MM. Frère et Desmarais étaient des maîtres de « l’art subtil et destructeur de la prédation ».