Les bons débarras
C’était la première élection en 50 ans dont la souveraineté était exclue comme enjeu explicite ou implicite. Le Parti québécois en a été durement puni. La décision de sortir sa propre option de la joute était celle du chef Jean-françois Lisée. Tout comme le choix navrant de s’en prendre à Québec solidaire en toute fin de course.
Ces deux erreurs ont été coûteuses. Le « chemin des victoires » de M. Lisée s’est transformé en chemin de croix pour ses troupes. Déjà fragile, une part substantielle du vote péquiste est allée butiner à la CAQ ou chez Québec solidaire. L’ironie la plus cruelle étant que ces deux formations sont nées en partie des entrailles mêmes du PQ.
Réduite à deux poignées d’élus, la performance du PQ est la pire de son histoire. À force de minimiser sa propre « raison d’être », le PQ a fini par verser dans l’obsolescence. Non sans rappeler la défaite cuisante du Bloc en 2011, le PQ est le plus grand perdant de cette élection. Une telle débâcle annonce une reconfiguration majeure de ce qu’il reste des troupes péquistes.
LA FIN D’UN RÈGNE
Au pouvoir presque sans arrêt depuis 2003, la fin du règne libéral s’explique avant tout par le gâchis indéniable de l’ère Couillard. Austérité. Réformes débilitantes en santé. Hausses astronomiques pour les médecins spécialistes. Inaction béate sur les questions linguistiques et identitaires. Etc.
Arrogante et dénuée de la moindre compassion, la gouverne inapte de Philippe Couillard est punie, elle aussi. Bien des Québécois se diront « bon débarras ». Le PLQ en sort amoché. Relégué à l’opposition officielle, dès qu’il aura trouvé son prochain chef, il retombera vite sur ses pattes.
Québec solidaire a gagné son pari. Avec une dizaine d’élus, même en régions, son rejet de toute alliance avec le PQ, vu par les solidaires comme un parti sur son déclin, aura bien servi ses intérêts partisans immédiats. Le discours « anti-élite » de Manon Massé a également visé juste. Le coup a porté.
ATTENTES IMMENSES
Après une campagne en montagnes russes, François Legault a su imposer la CAQ comme nouvelle solution de rechange aux libéraux. Il a même franchi les portes de Montréal. Neuf ans après avoir quitté le PQ, son rêve de devenir premier ministre se réalise. Après l’austérité libérale, les attentes sont toutefois immenses. En tête de liste, les citoyens s’attendront à un gouvernement qui a du coeur, un vrai.
M. Legault saura-t-il ressusciter un système de santé étouffé par les diktats du matamore Barrette ? Saura-t-il ren- forcer des services sociaux gravement affaiblis ? Réussira-t-il à ramener la confiance des Québécois envers leurs institutions tout en donnant un nouveau souffle à nos écoles publiques ? Et le recul du français ? Et cette pauvre question nationale, ignorée par les plus jeunes et oubliée par les plus vieux, qu’en fera-t-il ?
Majoritaire, le gouvernement Legault aura quatre ans pour répondre aux nombreuses inquiétudes des Québécois. Ayant réussi à rassembler une équipe de qualité, la chance au coureur est maintenant la sienne.