Montée de lait pour les producteurs du Québec
Des millions de dollars d’investissements sont mis sur la glace
Investissements remis aux calendes grecques, abattages d’animaux, mises à pied de travailleurs, faillites : les lendemains de L’AEUMC s’annoncent difficiles pour les producteurs de lait du Québec.
Le copropriétaire de la ferme Fernand Boivin de Saint-tite-des-caps, Dominic Boivin, n’est pas très optimiste pour l’avenir.
À moins d’un revirement, il compte mettre sur la glace l’investissement de 2 M$ qu’il voulait faire pour moderniser ses installations, avant de passer le flambeau à ses deux neveux. Mais dans le contexte actuel, rien n’est moins sûr.
« On ne laissera pas le monde dans la misère. Il y a une limite ! », lance le producteur, qui est à bout de souffle.
L’onde de choc risque d’ébranler plu- sieurs entreprises qui dépendent des 5308 fermes laitières du Québec. Milkomax, une PME de Sainte-monique, fabrique des robots de traite.
« Si ça brasse trop, il y en a gros qui vont vendre leurs quotas et fermer leurs portes. Ça pourrait venir vite », craint Victor Rousseau, PDG de l’entreprise.
DES VACHES TRAITÉES AUX HORMONES
Si le gouvernement fédéral veut être conséquent avec ses décisions, il doit prendre les moyens pour permettre aux producteurs de lait de se battre à armes égales avec les fermiers américains, pensent les producteurs.
« Aux États-unis, ils n’ont pas à respecter les mêmes normes de bien-être animal et environnementales. Ça coûte cher, ça! Aux États-unis, ils ont plein de travailleurs illégaux sur les fermes. Qu’ils nous mettent sur la même base, et on va compétitionner. Tout ce qu’on entend des consommateurs, c’est le prix ! », se désole le producteur de Saint-tite-des-caps.
Son confrère Ghislain Beauchemin de la ferme JN Beauchemin et Fils, à Saint-ours, en Montérégie, abonde dans le même sens.
À ARMES ÉGALES
« Si on veut être égal à eux autres, il faudrait que les consommateurs acceptent que l’on mette des hormones dans les oreilles des vaches, que l’on ne respecte pas l’environnement ni la partie médication et salubrité… », a-t-il ajouté.
Pour faire face à une baisse de la production, M. Boivin, qui est propriétaire d’un troupeau de 200 vaches, a dû envoyer une vingtaine de bêtes à l’abattoir, au printemps dernier, une opération qu’il pourrait reproduire si le contexte ne s’améliore pas.
« On va avoir plus de misère à arriver », poursuit M. Beauchemin, excédé.
Pour lui, tout comme pour M. Boivin, tout projet d’agrandissement est désormais sur la glace. « On ne prendra pas d’expansion. Ça, c’est clair », a-t-il dit, catégorique.
« J’EN CONNAIS QUI SE DEMANDENT S’ILS VONT PASSER À TRAVERS. » – Dominic Boivin, copropriétaire de la ferme Fernand Boivin.