Crise d’identité au PLQ
27 mars 2007. Les artisans du Parti québécois se relèvent des élections de la veille avec un sérieux mal de tête, après avoir fini en troisième position sous la direction d’andré Boisclair. Jamais on ne crut possible d’être si violemment expulsé du cycle de l’alternance.
3 octobre 2018. C’est en sifflotant que le personnel politique de l’opposition officielle vaincue fait ses boîtes, somme toute serein. « On est quand même habitués », conviennent certains stratèges de ce parti qui va de plancher historique en plancher historique depuis plus d’une décennie.
Chez les libéraux, l’ambiance est tout autre. Avant de partir en campagne, on leur avait promis la victoire, tant le vote libéral captif ne pouvait aller ailleurs que chez eux. On a appris lundi que ces électeurs pouvaient néanmoins décider de rester chez eux. Amertume et rancoeur s’exprimaient lundi soir pour laisser place à des visages livides le lendemain, et pas particulièrement à cause d’un soir de scotch qui aura fini quand même tôt.
RETROUVER « LE PRÉCIEUX »
En bon parti de pouvoir, les libéraux sont pragmatiques. À leur arrivée au caucus, rescapés comme défaits n’hésitaient pas à poser des constats lucides sur les raisons de la désaffection des francophones à l’endroit de leur parti. Jean-marc Léger évalue d’ailleurs que le PLQ n’aura recueilli que 12 % du vote de cet électorat, ce qui en fait la quatrième force politique du Québec, hors Montréal.
Néanmoins, les libéraux voudront vite retomber sur leurs pattes afin de retrouver leur « précieux », ce pouvoir qui, selon eux, leur revient de droit. Contrairement aux péquistes, ils ne succomberont pas aux atermoiements et aux déchirements qui sont le fait de ceux qui craignent de ne pas voir le grand soir avant de mourir.
N’empêche que la voie à emprunter n’est pas évidente à identifier. Euxmêmes ne faisaient que soupçonner à quel point l’argument de la peur référendaire était le ciment de leur coalition électorale. On débattra longtemps à sa- voir comment le retrait de la question nationale de l’équation aura affecté le Parti québécois, en bien ou en mal – il continue de baisser, qu’il en parle ou pas. Reste qu’en vidant l’eau de son bain, Jean-françois Lisée aura jeté le bébé libéral.
VIRAGES
Faut-il donc opérer un virage progressiste pour revenir aux racines sociales-démocrates de la Révolution tranquille, en y ajoutant un vernis écologiste ? Hasardeux. Ce n’est pas comme si le contexte politique mondial était favorable à la gauche modérée, comme l’a expérimenté le Parti québécois, supplanté par Québec solidaire en nombre de députés. De plus en plus, les électeurs de gauche préfèrent « la vraie affaire », l’option la plus radicale.
Doit-on plutôt prendre un tournant nationaliste en se montrant plus à l’écoute des préoccupations identitaires des Québec ? Probablement pas. Ce n’est pas dans la nature profonde du PLQ et c’est une niche déjà largement occupée par la CAQ et le PQ. En outre, il faut convaincre les non-francophones de se présenter aux urnes, en 2022… Mais, dès lors, comment se sortir de la marginalité dans le vote francophone ?
Bref, c’est au tour du Parti libéral d’être en crise d’identité et c’est sur celle-ci que portera la course à sa direction. En attendant, François Legault peut dormir tranquille : on a choisi une version plus drabe de Philippe Couillard comme chef intérimaire...