HANDICAPÉ POUR OTTAWA, MAIS PAS POUR QUÉBEC
Le fisc ne reconnaît pas sa déficience physique et refuse de lui verser le crédit d’impôt
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Revenu Québec a refusé à un résident de Québec, né sans sa main gauche, une attestation de déficience physique, alors qu’il a obtenu facilement son certificat d’impôt pour personne handicapée de l’agence du Revenu du Canada.
Pascal Hardy est venu au monde avec une malformation majeure au membre supérieur gauche en raison d’une maladie des lames amniotiques.
« Dans le ventre de la mère, le placenta a recouvert mon membre », relate le père de deux enfants. « Il n’y a pas eu de développement. »
L’an dernier à 40 ans, il a décidé d’effectuer un retour aux études à temps complet en service social. Une décision réfléchie qui a eu un impact financier sur sa famille.
Son conseiller pédagogique lui a indiqué qu’il avait droit à des bourses et des crédits d’impôt en raison de son handicap.
LE CANADA DIT OUI
Le médecin de M. Hardy a signé les documents dans lesquels il explique la nature de son handicap. Rapidement, les prêts et bourses lui ont accordé son statut de handicapé.
Au moment des impôts, le père de famille a rempli la demande de certificat pour personne handicapée de l’agence du revenu du Canada (ARC) ainsi que l’attestation de déficience de Revenu Québec. Le gouvernement du Canada a déterminé que Pascal Hardy répondait « aux critères d’admissibilité pour le CIPH », remboursant même rétroactivement 7000 $ pour les 10 dernières années.
De son côté, Revenu Québec a refusé sa demande. Sa contestation a aussi été rejetée. Pourtant, le formulaire du Québec et celui du Canada sont pratiquement identiques, souligne M. Hardy. « Comment je peux être reconnu au pays, mais pas dans la province », peste-t-il.
Dans la lettre de refus, Revenu Québec soutient que sa « situation » ne répond pas aux critères donnant droit à un crédit d’impôt.
CAPABLE DE MANGER
En signant le document, le médecin de M. Hardy a « coché » les cases indiquant qu’il pouvait voir, parler, entendre, marcher, utiliser ses fonctions intestinales, s’alimenter et s’habiller. Revenu Québec justifie le refus par ces raisons.
« C’est un peu bizarre le document. Je suis capable de faire des affaires. Mais je suis tout le temps en mode adaptation. Mon médecin n’avait pas de cases pour marquer que je devais toujours m’adapter, a expliqué le père de famille. Je suis handicapé depuis 40 ans et on ne m’avait jamais spécifié que j’avais droit à ça. Là, j’ai un crédit d’impôt que j’ai le droit d’avoir. »
Toutefois, même s’il a soutenu dans sa demande de révision que son handicap est « flagrant », « permanent », et qu’il s’agit « d’un défi quotidien », Revenu Québec a maintenu sa décision.
« Il y a différents types de handicap. Vous essayerez d’attacher vos souliers avec juste une main », dénonce M. Hardy.
Par ailleurs, il est reconnu comme handicapé par la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) qui oblige M. Hardy à respecter des conditions particulières pour conduire son véhicule.
À la suite de l’appel du Journal, Revenu Québec a souligné être prêt à réviser à nouveau le dossier avec M. Hardy. « Il semble y avoir peut-être une erreur dans la façon dont on [le médecin du demandeur] a rempli le formulaire […] Nous, on est en mode solution », a déclaré le porte-parole Stéphane Dion.