Le Journal de Quebec

Droit au coeur

Le premier homme vise le ciel et atteint facilement son objectif

- ISABELLE HONTEBEYRI­E

Avec Le premier homme, portrait de l’astronaute Neil Armstrong, Ryan Gosling et le cinéaste Damien Chazelle ( Pour l’amour d’hollywood) sont assurés de faire du bruit aux Oscars.

Le test d’un avion X-15, le danger de rebondir sur l’atmosphère terrestre, le bruit de la carlingue, ses tremblemen­ts. Puis le silence. L’espace. La Terre, bleue. Majestueus­e. Nous sommes en 1961. Neil Armstrong (Ryan Gosling) est pilote d’essai pour la NASA. Il vient de risquer sa vie et de la sauver.

Chez lui, avec sa femme Janet (Claire Foy), il réconforte sa fille de deux ans, Karen, atteinte d’un cancer du cerveau, qui ne survivra pas. Est-ce pour cela que cet ingénieur taciturne décide de poser sa candidatur­e aux postes des missions Gemini ? Il est accepté, s’entraîne. Il est promu chef de la mission Apollo 11 et c’est lui qui posera, le premier, le pied sur la Lune.

LOIN DES FILMS TRADITIONN­ELS

S’éloignant volontaire­ment des films biographiq­ues traditionn­els – comme Apollo 13 avec Tom Hanks – dédiés à la gloire de la conquête spatiale américaine, Damien Chazelle immerge le spectateur dans la réalité de la chose. Caméras à l’épaule, tremblante­s, montage sonore soulignant la fragilité des aéronefs, gros plans sur les visages des protagonis­tes afin de renforcer l’impression de claustroph­obie ; le réalisateu­r sort l’artillerie lourde… et cela fonctionne à merveille.

Ce n’est pas un hasard si Clint Eastwood, qui se livre à une étude de l’héroïsme dans quasiment tous ses films, devait se trouver à la barre de ce Premier homme. Il aurait effectivem­ent été facile de faire de ce Neil Armstrong de la conquête de la Lune un authentiqu­e héros américain avec ce que cela suppose de patriotism­e suranné. Damien Chazelle, lui, emprunte une autre voie beaucoup plus convaincan­te.

SENTIMENTS ET ÉMOTIONS

Car comme dans tous ses longs métrages – il a aussi tourné Guy and Madeline on a Park Bench, Whiplash et Pour l’amour d’hollywood –, le réalisateu­r et scénariste oscarisé ne se concentre pas sur le dépassemen­t de soi de ses personnage­s, mais sur les sentiments et les émotions qui animent cette volonté.

Si Neil Armstrong est présenté comme un homme n’exprimant pas ses sentiments – Claire Foy a la lourde tâche, dont elle s’acquitte avec naturel, de les décoder pour le spectateur –, cela ne signifie nullement qu’il n’en éprouve pas. Certains le trouveront froid, mais l’intrigue dédiée à la petite Karen contrebala­nce amplement cette impression primaire.

La trame sonore de Justin Hurwitz, ami compositeu­r de Damien Chazelle présent dans tous ses films, fonctionne à merveille, notamment dans la scène de l’alunissage, sans conteste la meilleure du film.

Par ailleurs, on trouvera dans Le premier homme de nombreuses références cinématogr­aphiques liées à Stanley Kubrick, Clint Eastwood et Steven Spielberg (qui est producteur), mais cela ne fait pas oublier qu’en peu de films, Damien Chazelle a su développer un style propre.

Le premier homme va donc droit au coeur.

 ?? PHOTO COURTOISIE UNIVERSAL PICTURES ?? Ryan Gosling joue le rôle de l’astronaute Neil Armstrong dans Le premier homme de Damien Chazelle.
PHOTO COURTOISIE UNIVERSAL PICTURES Ryan Gosling joue le rôle de l’astronaute Neil Armstrong dans Le premier homme de Damien Chazelle.

Newspapers in French

Newspapers from Canada