Espoirs et désillusions
La pièce Manifeste de la Jeune-fille, présentée au Théâtre Périscope, divertit et secoue les spectateurs
Vouloir changer le monde et souhaiter le rendre meilleur est un objectif fort louable. Manifeste de
la Jeune-fille démontre, avec un constat sombre et cynique, que la chose est loin d’être facile à réaliser.
À l’affiche au Théâtre Périscope jusqu’au 20 octobre, la création d’olivier Choinière se déploie à travers un spectacle fort, très divertissant et qui frappe.
Manifeste de la Jeune-fille débute lentement. Les personnages, interprétés par Raymond Cloutier, Stéphane Crête, Muriel Dutil, Joanie Martel, Catherine Paquin-béchard, Sébastien René et Isabelle Vincent, tous excellents, défilent avec dynamisme sur l’espace de jeu, en lançant des slogans provenant de magazines féminins et de campagnes publicitaires.
Ils exposent, comme dans un défilé de mode, leurs vêtements et aussi leurs idées préfabriquées.
MUTATION
Et lentement, cette superficialité anodine se transforme. Les personnages critiquent les politiciens carriéristes, l’idéologie des « boomers » et des « milléniaux », ceux qui décident de monter au front pour manifester, la violence policière et ceux qui désirent protéger la planète.
Le personnage interprété par Joanie Martel livre une charge particulièrement violente, où elle fantasme sur l’idée d’éliminer des politiciens du Québec et du monde. On aborde ensuite le terrorisme.
SANS JUGEMENT
Manifeste de la Jeune-fille ne porte pas de jugement. La pièce présente et déconstruit avec habileté les différentes argumentations.
Les personnages se regroupent pour ébranler les convictions de ceux qui croient détenir la vérité absolue. Accolés au pied du mur, ils finissent par montrer leurs contradictions, et qu’ils ne prônent pas toujours, finalement, ce qu’ils disent.
Le constat s’alourdit. Le rire est présent et devient jaunâtre, comme l’a précisé la comédienne Isabelle Vincent en entrevue. Le sentiment d’impuissance face à la possibilité réelle de changer les choses se déploie avec force.
L’oeuvre aborde avec beaucoup d’humour, dans le dernier droit, l’art et les motivations du public versus le théâtre.
Un moment où les comédiens brisent le quatrième mur, avec beaucoup d’autodérision, et qui permet de s’éloigner du cynisme et de la grande noirceur. Une sorte de décrochage où les grands problèmes sont balayés sous le tapis.
Une noirceur qui revient toutefois lorsque l’on quitte la salle et que l’on constate l’immensité de la tâche à accomplir. Manifeste de
la Jeune-fille divertit, secoue et fait réfléchir.