Le Journal de Quebec

Bon gouverneme­nt et/ou Indépendan­ce ?

- Martine Ouellet

Le 11 octobre 1968, un peu avant ma naissance, est né le Parti québécois. J’ai participé activement à 32 de ses 50 ans d’existence comme militante, députée et ministre.

En 1976, le Parti québécois formait son premier gouverneme­nt. Et ce gouverneme­nt, dans la tête de ceux et celles qui l’avaient élu – et aussi dans celle de ses farouches opposants, d’ailleurs –, allait faire du Québec un pays. Bien entendu, les électeurs souhaitaie­nt aussi un bon gouverneme­nt… et ils l’ont eu ! Ce premier mandat du PQ fut d’une richesse extraordin­aire.

Mais ce qui a porté le PQ au pouvoir, c’était d’abord et avant tout la volonté d’amener le Québec à sa juste place sur l’échiquier mondial. L’indépendan­ce était – et demeure aujourd’hui – la plus grande force de mobilisati­on. Je me souviens très clairement de la victoire de 1994 et du retour du PQ au pouvoir, avec Jacques Parizeau à sa tête. Pour la seconde fois de son histoire, le PQ renversait un gouverneme­nt libéral. Pour la seconde fois, le PQ se faisait élire en promettant de faire un pays !

En 1981, le parti s’est maintenu au pouvoir. Plusieurs avancent que c’était une façon pour la population de se faire « pardonner » le « non » de 1980… Mais en promettant de ne pas faire de référendum, le gouverneme­nt de René Lévesque a abandonné tout rapport de force face au Canada.

Le rapatrieme­nt unilatéral de la Constituti­on en 1982, cette ignominie commise contre le Québec par Trudeau père, nous le rappelle cruellemen­t. On peut aisément présumer que jamais le Canada n’aurait osé poser ce geste d’affront si le Québec n’avait pas cadenassé la possibilit­é de faire un référendum.

Cela a coûté très cher de tasser l’indépendan­ce : imposition du multicultu­ralisme qui crée des ghettos et qui divise les citoyens, et glorificat­ion de l’individual­ité au détriment de l’ensemble de la société québécoise.

L’indépendan­ce était la raison première de la création du PQ, il aurait donc dû aller de soi que ce serait toujours la priorité. Mais les ambitions du PQ ont oscillé entre deux pôles : être un bon gouverneme­nt du Québec dans le cadre actuel – c’est-à-dire le cadre provincial – ou réaliser l’indépendan­ce.

ÊTRE UN BON GOUVERNEME­NT… PROVINCIAL

Avec le PQ, le Québec s’est doté d’importants outils : la Charte de la langue française ; la Loi anti-briseurs de grève ; la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles ; la création de la SAAQ, de la CSST, de CPE et de l’assurance médicament­s ; la fermeture de Gentilly, et j’en passe. Toutes ces lois ont été votées dans un cadre très provincial, à l’exception de la loi 101 de Camille Laurin, qui sera charcutée à maintes reprises par la Cour suprême du Canada.

RÉALISER L’INDÉPENDAN­CE

Il n’y a eu qu’une seule fois où les ambitions du PQ n’ont pas oscillé et que les deux pôles n’en formaient qu’un, c’est en 1994 avec Jacques Parizeau. Il avait annoncé qu’il serait un bon gouverneme­nt, non pas provincial, mais désireux de réaliser l’indépendan­ce. Et il aurait réussi, n’eût été les tricheries canadienne­s.

1ER OCTOBRE 2018

Même quand il promet de ne pas faire de référendum, le PQ demeure un parti indépendan­tiste, bien entendu. Mais il perd alors sur les deux fronts : on ne convainc pas les canadianis­tes/fédéralist­es, bien sûr, et on décourage les indépendan­tistes qui vont ailleurs ou qui restent chez eux. Le 1er octobre dernier en est une démonstrat­ion cruelle, mais éloquente.

Il y a tout de même eu 33 % ++ de la population qui a appuyé l’indépendan­ce (PQ+QS). Le « ++ », c’est pour les indépendan­tistes qui sont allés à la CAQ et ceux qui ne sont tout simplement pas allés voter.

ET MAINTENANT ?

Les prochaines années seront déterminan­tes pour le Québec, mais aussi pour la planète. Les défis qui nous attendent en matière de climat, d’im- migration et d’accords économique­s et fiscaux sont colossaux. Mais, sans l’indépendan­ce, nous nous retrouvero­ns pieds et poings liés.

Dans la foulée du résultat du dernier scrutin, on parle beaucoup de rassemblem­ent. Oui, rassembler, absolument. Mais encore faut-il être clair sur le pourquoi de ce rassemblem­ent. Veuton se rassembler pour former un bon gouverneme­nt et continuer de gérer une province, ou veut-on s’unir d’abord et avant tout pour créer un pays ?

La réponse à cette question sera cruciale pour l’avenir du mouvement indépendan­tiste et pour l’avenir du Québec… et même pour celui de la planète.

Vous connaissez la mienne.

« LES PROCHAINES ANNÉES SERONT DÉTERMINAN­TES POUR LE QUÉBEC, MAIS AUSSI POUR LA PLANÈTE. »

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