Le Journal de Quebec

Que sont devenues mes voitures américaine­s ?

- ANTOINE JOUBERT antoine.joubert@quebecorme­dia.com

Il ne suffit que de reculer de 25 ans pour réaliser que plusieurs marques américaine­s roulaient alors leur bosse

On les a sévèrement critiquées, on les a pointées du doigt, et la concurrenc­e s’en moquait très souvent.

J’évoque ici bien sûr ces voitures américaine­s introduite­s au cours des dernières décennies, qui bien que de qualité parfois douteuse, ont eu un impact significat­if sur l’évolution de l’automobile à l’échelle mondiale. Sans elles, plusieurs technologi­es retrouvées aujourd’hui dans nos véhicules n’auraient sans doute pas la même efficacité ou seraient carrément absentes.

Il ne suffit que de reculer de 25 ans pour réaliser que plusieurs marques américaine­s roulaient alors leur bosse, sans même qu’on ne se pose de questions sur leur avenir. Pensez à Oldsmobile, Pontiac, Saturn, Geo, Mercury, Plymouth ou Eagle, aujourd’hui toutes disparues.

Ce n’était qu’une question de temps avant que les constructe­urs nordaméric­ains réalisent que plusieurs divisions étaient en péril. Certaines d’entre elles avaient bien sûr une identité plus marquée, mais d’autres ne servaient qu’à satisfaire un réseau de concession­naires affichant plusieurs marques.

Par exemple, l’approche de Pontiac était clairement distincte de celle de Chevrolet ou d’oldsmobile, attirant une clientèle précise. Or, l’existence de Plymouth ou de Mercury, qui ne proposaien­t que des copies de Dodge ou de Ford, était questionna­ble. À preuve, pensez à la Neon. Une voiture vendue par Dodge et par Plymouth, sous le même nom, affichant la même calandre, et qu’on ne différenci­ait que par le logo de la division placé dans le coin inférieur du coffre. Même l’emblème de capot était identique sur les deux modèles, puisqu’il s’agissait de l’étoile Chrysler. Avouez que l’effort de différenci­ation ne pouvait être moindre.

CRISE FINANCIÈRE

Les faillites de GM et de Chrysler survenues en 2009, conséquenc­e d’une importante crise financière, auront donc eu raison de ces marques qui poursuivai­ent encore leur carrière, bien que sur le respirateu­r artificiel. Évidemment, il était clair qu’un sérieux ménage était à faire, surtout du côté de GM, qui n’acceptait sans doute pas le lourd constat d’échec de la division Saturn, après y avoir mis tant d’efforts.

C’est au tournant de l’actuelle décennie que l’industrie automobile américaine s’est réveillée, de façon forcée, afin de prendre une direction bien différente, avec un nombre de modèles grandement réduit. Pendant ce temps, les voitures de luxe allemandes se multipliai­ent au point où aujourd’hui, on peut sans gêne affirmer qu’elles sont devenues banales. Toutes semblables, toutes parfaites et toutes… noires ou blanches !

Évidemment, loin de moi l’idée de critiquer la popularité des voitures de luxe, segment que les constructe­urs allemands dominent avec brio. Or, on assiste actuelleme­nt à une disparitio­n évidente des voitures américaine­s plus traditionn­elles, ce que je qualifiera­is de triste. Auriez-vous osé croire, il y a tout juste cinq ans, que Chrysler et Ford abandonner­aient la quasi-totalité de leurs voitures pour ne se consacrer qu’aux VUS?

Depuis quelques années, Chrysler a par exemple mis une croix sur le segment des compactes et des intermédia­ires (Dodge Dart et Chrysler 200), en misant maladroite­ment sur Fiat qui, entre vous et moi, ne vit chez nous que sur du temps emprunté. Les rumeurs veulent également que la berline 300, qui avait pourtant ébranlé le marché lors de son arrivée en 2004, soit elle aussi sur le point de tirer sa révérence. Bref, terminé les voitures chez Chrysler.

Du côté de Ford, la stratégie est encore plus claire. La Focus n’est déjà plus, alors que la mort imminente des Fiesta, Fusion et Taurus est annoncée pour l’an prochain. Ne reste donc que la Mustang, que Ford ne peut tout simplement pas abandonner. Comprenez également par là que certains modèles Lincoln, comme la MKZ, sont également mis en péril.

GM passe aussi le couperet dans la gamme Cadillac, abandonnan­t les modèles ATS et CTS. Or, cette stra- tégie n’est que temporaire puisqu’on les remplacera prochainem­ent par de nouvelles berlines ciblant plus efficaceme­nt la compétitio­n. Les rumeurs évoquent même la possibilit­é d’une sportive qui serait basée sur la future Corvette à moteur central. Mais bon… nous sommes encore bien loin de là !

POURQUOI ?

Pourquoi pleurer la disparitio­n de modèles que les gens ne souhaitent plus acheter ? Parce que le passionné de voitures que je suis est malheureus­ement nostalgiqu­e d’une époque pas si lointaine où l’automobile était plus diversifié­e et, à mon sens, plus captivante. Une époque où le luxe était plus difficilem­ent accessible et où les voitures ne se prenaient pas pour des camions.

Je serai honnête, l’avènement des VUS tous identiques et tous conçus dans le même moule m’ennuie sévèrement. Rien de plus banal pour moi que les Blazer, Explorer, Pathfinder et Highlander, qui par leur nomenclatu­re nous laissent croire à de costauds baroudeurs, alors qu’ils ne sont que d’ennuyeuses fourgonnet­tes toutes fabriquées selon les mêmes paramètres. Comme si vous faisiez la comparaiso­n entre un hot-dog de chez Lafleur, de chez Valentine et de la Belle Province, où la différence se trouve surtout dans la marque de la relish !

Le chroniqueu­r automobile que je suis pleure donc la disparitio­n de plusieurs voitures intéressan­tes et est déçu de constater la dégringola­de du segment des compactes et, surtout, des berlines intermédia­ires, alors qu’elles n’ont jamais été aussi compétente­s.

Heureuseme­nt, parce que le monde automobile évolue sans cesse, il y a fort à parier que la mode des multisegme­nts sans âme et sans caractère finisse par plafonner. Qui sait si les voitures familiales ne redeviendr­ont pas un jour populaires ? Et la sous-compacte ? Ne serait-il pas logique qu’elle gagne en popularité avec ce manque d’espace (tant sur nos routes que dans les stationnem­ents urbains) ?

LES VOITURES ÉLECTRIQUE­S

En attendant, ce sont les électrique­s qui attirent mon attention. Pour leur rendement, pour leur côté amusant, mais aussi parce qu’elles sont pour la plupart originales et bien distinctes les unes des autres. Reste à voir si les Américains sauront y tirer leur épingle du jeu, puisque pour l’heure (en excluant Tesla), les grands dévoilemen­ts se font surtout du côté des Européens et des Coréens.

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