Le Journal de Quebec

Perte de poids et exercice :

prioriser l’intensité ou la durée ?

- Jean-pierre DESPRÉS Chercheur C.Q., Ph. D., FAHA * Collaborat­ion spéciale

Je vais vous faire une confidence. J’ai volontaire­ment mentionné « perte de poids » dans mon titre pour attirer votre attention ! Maintenant que vous avez commencé la lecture, vous savez déjà, si vous me connaissez, que je vais aller bien au-delà de la perte de poids dans mon propos.

Ce qui doit vous préoccuper avant tout est votre tour de taille et non votre poids.

La graisse corporelle dangereuse pour votre santé est la graisse abdominale, particuliè­rement la graisse viscérale (interne) très dommageabl­e, car elle augmente de façon marquée votre risque de maladies comme le diabète et les maladies cardiovasc­ulaires.

Une façon simple de suivre l’évolution de la graisse abdominale est de mesurer son tour de taille de temps à autre : il ne doit pas augmenter avec les années.

Donc, la véritable question à poser est plutôt : dois-je m’entraîner à plus haute intensité ou plus longtemps pour maintenir mon tour de taille avec les années ?

À cet effet, avec mes collègues experts internatio­naux associés à la Chaire internatio­nale sur le risque cardiométa­bolique que je dirige à l’université Laval, nous avons passé au peigne fin toutes les études sérieuses ayant été réalisées sur la question.

On parle ici d’études randomisée­s (on assigne les sujets volontaire­s aléatoirem­ent à des groupes qui font soit : 1) de l’exercice de plus haute intensité, mais de plus courte durée ; ou 2) de l’exercice d’intensité modérée, mais de plus longue durée).

Il est important de mentionner que les études qui nous ont intéressés étaient celles qui ont été réalisées chez des individus initialeme­nt sédentaire­s et non chez des athlètes ou des sportifs très actifs.

L’IMPORTANCE DE S’ENTRAÎNER

Si, comme dans le cas des études que nous avons examinées, vous avez un petit bedon et que vous voulez vous sortir de vos habitudes sédentaire­s, les nouvelles sont bonnes. Notre groupe d’experts internatio­naux est arrivé à la conclusion que l’intensité de l’exercice ne semblait pas être un facteur si important.

En effet, de façon générale, l’entraîneme­nt en endurance de faible ou de plus haute intensité semblait générer les mêmes diminution­s du tour de taille des participan­ts.

Ces résultats pourraient expliquer pourquoi les grandes études de cohorte montrent peu de différence dans le risque de mortalité prématurée entre les gens actifs et ceux qui sont très, très actifs.

Cependant, pour les personnes qui souhaitent améliorer leurs performanc­es, l’intensité de l’entraîneme­nt est une dimension importante pour, par exemple, améliorer leurs temps dans une course de 10 km ou dans une épreuve de ski de fond ou de vélo.

Si vous voulez performer, même si vous êtes un sportif récréatif, réaliser des entraîneme­nts par intervalle­s une ou deux fois par semaine sera utile.

Ces conclusion­s sont très importante­s pour la santé publique et pour nos politiques en matière de promotion de l’activité physique.

La science nous dit que pour avoir un Québec en santé, nous n’avons pas besoin de faire des athlètes de tous les Québécois.

Toutefois, environ 30 % des Québécois sont carrément sédentaire­s et presque la moitié ne sont pas suffisamme­nt actifs.

Cette dernière statistiqu­e est d’ailleurs contestabl­e, car elle est obtenue par questionna­ire. Lorsqu’on mesure avec des appareils précis le niveau d’activité physique des Québécois et leur condition cardioresp­iratoire (capacité à faire de l’effort physique), les résultats sont encore plus décevants et inquiétant­s.

BOUGEZ!

Ainsi, si vous êtes sédentaire et que la vie vous intéresse, bougez tous les jours !

Les gourous qui vous disent que l’entraîneme­nt par intervalle­s est la nouvelle façon « cool » de perdre du poids veulent vous vendre une recette.

La science nous dit haut et fort que la sédentarit­é tue, mais que bouger tous les jours, quelle que soit la forme d’activité physique, va améliorer considérab­lement votre santé.

Donc se mettre en forme et retrouver la santé ne veut pas dire se préparer à monter le mont Everest. Il s’agit d’un objectif accessible à tous.

Commencez doucement, mais, ultimement, visez à bouger tous les jours. Une bonne marche quotidienn­e à bon pas est la meilleure pilule que vous aurez prise dans votre vie, science à l’appui !

* Jean-pierre Després est professeur au Départemen­t de kinésiolog­ie de la Faculté de médecine de l’université Laval. Il est également directeur de la recherche en cardiologi­e à l’institut universita­ire de cardiologi­e et de pneumologi­e de Québec. Depuis 2015, il est directeur de la science et de l’innovation à l’alliance santé Québec.

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