Des intervenants débordés après #moiaussi
Plusieurs consultants soutiennent que le mouvement est en train de changer les mentalités au travail
Le nombre de demandes pour des enquêtes de harcèlement sexuel en milieu de travail a explosé depuis l’émergence du mouvement #moiaussi il y a un an.
« Je n’ai jamais fait autant de dossiers de harcèlement de ma vie », dit Marie-claude Perreault, avocate et conseillère en relations industrielles.
Elle estime avoir effectué 60 % plus d’enquêtes de harcèlement, tous types confondus, cette année que par les années passées.
Lejournal s’est entretenu avec une dizaine de spécialistes qui, comme Me Perreault, ont vu l’impact concret du mouvement #moiaussi dans les entreprises.
Selon eux, plus de gens ont osé porter plainte dans leur milieu de travail : que ce soit une femme qui s’est fait toucher les parties intimes par un collègue lors d’un party de Noël ou un employé qui recevait des avances répétées de la part d’un patron en position d’autorité.
ANNÉE RECORD
Le 15 octobre 2017, le mot-clic était lancé et les dénonciations d’agressions et d’inconduites sexuelles se sont enchaînées, tant à Hollywood qu’au Québec.
Depuis, le téléphone n’a pas dérougi pour bon nombre de consultants.
« C’est une année record », dit Luc Chabot, de Relais Expert-conseil.
Sa firme a réalisé près de 400 enquêtes depuis l’automne dernier, une augmentation d’environ 25 %, estime-t-il.
Et de ce nombre, la proportion de dossiers incluant une dimension sexuelle a augmenté.
« J’ai maintenant des enquêteurs qui ne font que ça », dit-il.
Aussi, plus de gens ont osé dénoncer des situations qui ne sont pas récentes, qui remontent à plusieurs années, observe Cindy Viau, du Groupe d’aide et d’information sur le harcèlement sexuel au travail.
Mais malgré l’ampleur du mouvement, personne ne collige le nombre de plaintes pour harcèlement en milieu de travail à la grandeur du Québec. La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail le fait pour les salariés non syndiqués, mais ses chiffres ne distinguent pas le harcèlement psychologique du sexuel ( voir encadré).
CHANGEMENT DE CULTURE
Ce que plusieurs décrivent, c’est un changement de culture. Un gestionnaire fait une blague sexiste ? Il est fort probable que les gens ne fassent plus semblant de rire s’ils sont mal à l’aise, disent les consultants.
« Ces comportements n’étaient pas plus acceptables avant. La différence, c’est que les gens ont maintenant plus de facilité à en parler », explique Luc Chabot.
Cette vague n’a pas non plus donné lieu à plus de fausses allégations, dit-il. Les dossiers de harcèlement qui ont une dimension sexuelle se révèlent plus souvent fondés que les autres, a-t-il observé.
Il y a parfois des abus dans les cas de harcèlement psychologique, abonde Marie-claude Perreault. Par exemple, où est la ligne entre un patron qui décide de serrer la vis de la ponctualité à ses employés et des comportements harcelants ? Mais en proportion, les fausses dénonciations n’ont pas augmenté avec #moiaussi. « Non, ça n’a pas créé un bar ouvert, résume-t-elle. Mais maintenant, la tolérance zéro a des dents ».
Visionnez la vidéo de Tabloïd sur la Place des festivals pour le premier anniversaire de #Moiaussi